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© Inventer le Grand Paris

De l’art des jardins dans la construction du Grand Paris : Parcs historiques suburbains, entre protection et opportunités. L’exemple de Sceaux 1923-1937

par Stéphanie de Courtois

Résumé

En 1924, lorsque le Département de la Seine acquiert le domaine de Sceaux, le parc constitue une pièce de choix dans le dispositif auquel de nombreux urbanistes s’attachent pour refaire de Paris une ville vivante, vivable et à la mesure de la pression urbaine qu’elle subit. Initialement dessinés par Le Nôtre, le domaine de près de 220 hectares est alors dans un grand état d’abandon ; tournant le dos au passé princier pour en faire un espace largement ouvert au public citadin, les projets se succèdent pour reprendre le parc et en réorienter les objectifs, d’abord par Jean Claude Nicolas Forestier (1861-1930), puis par Léon Azéma (1888-1978), architecte de la Ville de Paris. Si le lotissement d’une large part à l’est se fait progressivement et presqu’inexorablement, le domaine fait l’objet d’une intense transformation qui continue jusqu’aujourd’hui, aussi bien – et c’est ce qui en fait l’intérêt – à l’échelle métropolitaine de l’assainissement, des flux ou des infrastructures de sport, que de celle des parterres ou de la statuaire.

La communication se concentrera sur l’intense période de la reprise du parc. Épousant les riches débats et espoirs contemporains quant au rôle des anciens parcs, tout comme ceux sur la restauration des parcs et jardins, le destin du parc reflète les projections faites sur ce qui devint avant l’heure un équipement du Grand-Paris sans renoncer à offrir l’expérience du jardin.

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https://www.inventerlegrandparis.fr/link/?id=2616

DOI

10.25580/IGP.2022.0036

Stéphanie de Courtois est docteur en histoire de l’art (Paris 1) et poursuit ses recherches sur le patrimoine paysager français et européen, sa valorisation et ses acteurs. Elle contribue à sa meilleure prise en compte, notamment par ses engagements dans différentes instances, dont la Commission nationale de l’architecture et du Patrimoine. Au sein du Léav – Laboratoire de l’École d’architecture de Versailles –, elle coordonne l’axe 3 du Patrimoine, héritage et création. Maître de conférence dans le champ Ville et Territoire, elle enseigne, en particulier au sein du Master 2 Jardins historiques, patrimoine, paysage, dont elle est responsable scientifique et pédagogique, en partenariat avec l’université Cergy Paris Université.


Français

En 1924, lorsque le Département de la Seine acquiert le domaine de Sceaux, le parc constitue une pièce de choix dans le dispositif auquel de nombreux urbanistes s’attachent pour refaire de Paris une ville vivante, vivable et à la mesure de la pression urbaine qu’elle subit. Initialement dessinés par Le Nôtre, le domaine de près de 220 hectares est alors dans un grand état d’abandon ; tournant le dos au passé princier pour en faire un espace largement ouvert au public citadin, les projets se succèdent pour reprendre le parc et en réorienter les objectifs, d’abord par Jean Claude Nicolas Forestier (1861-1930), puis par Léon Azéma (1888-1978), architecte de la Ville de Paris. Si le lotissement d’une large part à l’est se fait progressivement et presqu’inexorablement, le domaine fait l’objet d’une intense transformation qui continue jusqu’aujourd’hui, aussi bien – et c’est ce qui en fait l’intérêt – à l’échelle métropolitaine de l’assainissement, des flux ou des infrastructures de sport, que de celle des parterres ou de la statuaire.

La communication se concentrera sur l’intense période de la reprise du parc. Épousant les riches débats et espoirs contemporains quant au rôle des anciens parcs, tout comme ceux sur la restauration des parcs et jardins, le destin du parc reflète les projections faites sur ce qui devint avant l’heure un équipement du Grand-Paris sans renoncer à offrir l’expérience du jardin.


La place des espaces libres dans la constitution du Grand Paris a déjà été étudiée, notamment dans les travaux de Laurent Hodebert sur Henri Prost (1874-1959), de Jean-Luc Cohen sur Jean Claude Nicolas Forestier (1861-1930), Beatriz Fernández à propos de Léon Jaussely (1875-1932), ou encore plus récemment par Corinne Jaquand à propos de la théorie du Grand Paris dans l’entre-deux-guerres[1]. Il semble que la place spécifique des jardins historiques, en tant que patrimoine paysager susceptible de réappropriation, de restauration ou d’adaptation, a encore peu été envisagée. Si ces parcs, souvent issus du Domaine de la Couronne ou de grandes familles princières avaient déjà été investis par un large public, la première guerre va représenter un véritable tournant dans l’histoire de ces parcs[2]. En effet, après les dégâts de la guerre, la reprise sera une période extrêmement féconde pour ces jardins, avec une variété d’attitudes quant aux choix de restauration qui vont y être opérés ; ils sont vus comme des espaces de prestige, représentant la France.

Aussi, lorsque en 1932 des architectes sont invités à réfléchir à l’emplacement de la future Exposition de 1937, les nombreux projets s’appuient-ils essentiellement sur des jardins historiques comme Saint-Cloud, Bagatelle, les Tuileries ou encore Versailles[3]. Parmi ceux-ci, MM. Fenzy, Carreau et Royer formulent une proposition appelée « Carrés Bleu et Rouge superposés » ; elle s’appuie sur le parc de Sceaux, estimant que « ce parc est appelé à jouer le rôle du Luxembourg et des Tuileries dans le développement considérable que prend l’agglomération parisienne dans cette région. […] Le grand canal se prêterait admirablement au développement de fêtes dans un magnifique cadre. Les espaces libres semblent assez vastes pour qu’il n’y ait aucun arbre à sacrifier. En conclusion ce serait une belle solution pour hâter l’exécution des moyens de transport et des améliorations urbaines projetées. »

Si l’Exposition de 1937 n’aura finalement pas d’annexe à Sceaux, l’idée du parc de Sceaux comme lieu d’exposition va perdurer. Ce parc autrefois dessiné pour Colbert représente un endroit particulièrement important dans cette période car il a fait l’objet depuis 1923 d’une intense campagne de restauration et de transformation qui s’accélère après 1929 lorsque l’architecte Azéma (1888-1978) prend la suite de Jean Claude Nicolas Forestier. Cent ans après, c’est un parc toujours très investi et fréquenté, et 2023 sera l’occasion de célébrer le centenaire de son rachat par le Département, avec une exposition qui présentera cette départementalisation du parc et les différentes actions qui y ont été entreprises[4].

Le parc de Sceaux occupe une place particulière dans la construction de la politique des espaces libres régionaux. En effet, juste après-guerre, Sceaux est absent de la planification régionale, mais il va progressivement y être intégré, à la faveur du rachat par la puissance publique. Les travaux des années 1930, puis la perspective de l’exposition de 1937 vont progressivement le remettre au centre de l’attention. Nous nous proposons donc de l’étudier sur une période assez courte à partir de 1923, quand le département de la Seine acte l’achat des 222 hectares de parc aux descendants des Trévise, la famille qui gérait le lieu depuis le 19e siècle. La Commission du Vieux Paris qui se penche régulièrement entre 1923 et 1925 sur cet achat parle alors d’une « grande opération de prévoyance et de sauvegarde »[5]. L’autre limite temporelle de cette communication est fixée en 1937, avec l’Exposition internationale des arts et des techniques appliqués à la vie moderne qui a donné une large visibilité aux jardins, à défaut d’une place physique, et été l’occasion d’un profond renouveau formel[6] ; elle a surtout constitué un aiguillon pour tous les projets d’aménagements de la région parisienne, et l’occasion parmi les urbanistes d’affronter assez directement le thème de l’art des jardins, comme on disait alors. Moment clé dans la prise en compte des jardins historiques dans la pensée de la création de la ville, cette manifestation représente également un moment important pour les paysagistes français avec le premier congrès des architectes-paysagistes[7], aussi ses préparatifs et la place particulière que Sceaux y tient nous paraissent-ils devoir être éclairés.

Il s’agira d’évaluer la façon dont la dimension historique de ce parc est appréhendée, d’analyser les enjeux politiques et les différents corps sociaux ou professionnels qui s’emparent de ce domaine historique et de souligner la manière dont il a été intégré dans une politique des espaces libres pour la ville. Pour ce faire, deux sources ont été convoquées : les fonds de préparation de l’Exposition de 1937[8], et la revue Urbanisme dont le comité de direction, de Prost à Royer, Vera, Gréber ou Sellier, pour ne citer qu’eux, représente précisément cette imbrication entre les problématiques du jardin et de la ville.

Après avoir évoqué l’émergence de la notion de patrimoine paysager et de la nécessité de le protéger, d’abord dans sa dimension stylistique à travers compositions et perspectives des parcs, puis en tant qu’espace libre, nous nous attarderons sur l’apport spécifique – une poésie particulière et une manière de pratiquer l’espace – qui attire l’attention des architectes, des urbanistes et des habitants sur ce parc, dans la civilisation des loisirs et du sport en train de naître. Nous verrons également mûrir la conscience de son intérêt écologique, non seulement pour le sol mais aussi pour les arbres. Enfin nous mettrons en évidence l’importance de la notion d’échelle de ce patrimoine, celle du département, Sceaux étant au départ un parc partagé entre trois communes.

 

 

La reprise d’un domaine historique, un projet fédérateur contre le lotissement

Le domaine de Sceaux a donc fait l’objet d’une véritable reprise et été réintégré en tant que patrimoine paysager.

Au sortir de la guerre, une menace plane sur ces grands domaines, celle du lotissement. Beaucoup de domaines sont concernés, comme en attestent les affiches de mise en vente de lots pour le lotissement du parc du château de Chatou ou sur les coteaux de Longchamp à Saint-Cloud, par exemple. La presse se fait l’écho de l’appétit féroce des promoteurs, et avec l’augmentation exponentielle de la population de la région parisienne, la peur que le parc Sceaux soit loti augmente également.

La ville de Sceaux et son parc sont depuis longtemps connus des Parisiens qui vont s’y promener, se rafraîchir et se divertir [9]. En effet, après la Révolution, des entrepreneurs rachètent le terrain de la Ménagerie pour y faire une salle de bal. Grâce au chemin de fer arrivant dès 1846 juste devant le château, les Parisiens se rendent au célèbre bal aménagé dans un bosquet en bordure de la ville. De nombreux passages de la littérature évoquent d’ailleurs ce fameux bal de Sceaux. Un Hugo très jaloux y aurait surpris sa fiancée… Cet endroit est donc déjà une sorte de vase d’expansion pour les Parisiens. À cette époque, le parc, quoique privé, était déjà ouvert au public. Le lycée Lakanal voisin y menait ses élèves pour ses récréations, et même parfois pour des cours au plein air. Un club de sport très chic, des tennis, des cyclistes et la Patriote de Sceaux y viennent aussi pour leurs exercices[10].

Lorsque la guerre arrive, les Allemands s’y installent. On sait que les Trévise peinent à entretenir ce parc, et les observateurs surveillent combien de temps encore ils pourront résister au lotissement d’un lieu dont l’état d’abandon inspire les célèbres clichés d’Eugène Atget[11]. Ce dernier photographiera le parc sur une longue période, pendant dix ans à partir de 1915, et nous livre ainsi de précieuses archives. Au décès de la marquise de Trévise, son héritière décide de se défaire de la propriété. Ce sont les édiles locaux, élus de tous bords, qui alertent le Département et l’État sur l’intérêt de ne pas manquer cette opportunité et parviennent lors d’une visite du parc décisive le 5 juillet 1923 à convaincre les édiles de Paris de la qualité des lieux et de l’intérêt d’effectuer ce rachat[12]. Voici comment la commission de Vieux Paris, qui suit de près cette acquisition, décrit le lieu : « L’ordonnance des terrasses et des parterres se lient encore sur le terrain malgré l’appauvrissement des buis et l’envahissement des herbes. Quatre files d’ifs taillés, tout moderne, ne l’ont pas déparé. Les trois miroirs d’eau claire reflètent encore le ciel » [13]. Le préfet de la Seine défendant en juillet 1923 : « Je m’empresse d’ajouter que l’acquisition du domaine de Sceaux ne doit pas être uniquement considérée comme ayant pour objet la conservation et l’ouverture au public d’un parc magnifique, dont la superficie égale celle de toutes les promenades inférieures de Paris réunies. Elle doit être envisagée également comme une opération d’aménagement de la banlieue ». Après l’achat, le secrétaire de la Commission du Vieux Paris Elie Debidour s’enflamme : « c’est une des plus importantes créations de Le Nôtre, c’est tout un patrimoine d’art où revit la pensée de quelques-uns des plus grands maîtres du XVIIe siècle », tandis qu’un autre membre, André Hallays, « espère fermement que l’administration saura faire le nécessaire […] pour assurer la restauration de toutes les parties du domaine qui représentent l’état ancien. […] Paris peut, et doit avoir là, non seulement une magnifique réserve d’air et d’espace, mais un beau domaine de plaisance et d’art. »[14]

Sur les 228 hectares, 77 hectares sont finalement prélevés pour des lotissements, des espaces de sport et autres équipements aménagés aux abords de la ligne de chemin de fer. Dès le 25 octobre 1924, Jean Claude Nicolas Forestier, alors conservateur des parcs et promenades la ville de Paris, présente le plan d’un avant-projet de restauration, s’appuyant sur un relevé détaillé des arbres dont la plupart auraient à peu près 80 ans, et les plus vieux 150 ans. Ce n’est plus un parc de Le Nôtre car de nombreuses transformations y ont été faites, ce qui l’amène à indiquer qu’il n’est pas envisageable de chercher à reproduire à l’identique le parc de Le Nôtre, qui coûterait trop cher à mettre en œuvre et en entretien à long terme. Mais Forestier indique que néanmoins les principaux tracés de l’ancien jardin de Colbert pourront être respectés, et en particulier les alignements. Ce projet serait aussi l’occasion de donner à la promenade un caractère public, incluant des jeux qu’il place loin des espaces marqués par Le Nôtre. Le projet de Forestier est validé par Conseil général de la Seine qui approuve aussi le projet de lotissement à ce moment-là, lequel est astreint à un cahier des charges assez sévère. Le parc est classé Monument Historique le 24 septembre 1925, le Plan d’Aménagement, d’Extension et d’Embellissement est exposé en 1927 et sera validé en 1933[15], mais le projet de Forestier est finalement abandonné après son départ en retraite en 1929.

Léon Azéma (1888-1978), dans son rôle d’architecte de la ville de Paris, est ensuite sollicité et suivra la reprise de ce domaine. Le domaine étant encore en location, l’intervention ne peut être menée avant la fin 1928. La proposition d’Azéma ne veut pas opérer une restauration ni une reconstitution, mais un projet très simplifié à partir des grands tracés du parc historique. Il prévoit un programme de travaux de curage et reprise de l’Octogone et du Grand canal, et des travaux importants de reprise du système d’adduction avec des stations de pompage, en remplacement des anciennes canalisations fort endommagées par la construction de nombreux lotissements.

La Commission du Vieux Paris continue à suivre attentivement les travaux et constate en 1931 : « Jusqu’ici, une partie du « Tapis vert » est à la disposition des visiteurs qui auront, au printemps prochain accès, dans toute la région boisée comprise entre la zone précédemment aménagée : les berges du Grand canal, la route de Versailles à Choisy-le-Roi et une partie des terrains que, pour raison budgétaire, le Département a aliénés au profit d’un élégant lotissement grevé des servitudes indispensables »[16]. Une quatrième phase est prévue aux abords du canal, qui se poursuivra « par une plantation de trois lignes d’arbres, le long des rues, et [par] la création d’allées et de pelouses », ainsi que par la reprise de l’allée dite « des cascades », cascades de nombreuses fois décrites à l’époque de Colbert et qui avaient été très endommagées. Il est décidé de les reprendre entièrement sur un projet d’Azéma dans une esthétique tout à fait différente de leur état initial : le rapporteur de la Commission précise qu’il « ne pouvait être, évidemment, question de rétablir les cascades féériques. Toutefois, la maquette que nous avons vue du projet des services d’architecture, concilie à la fois les exigences budgétaires, et le souci de reconstitution qui n’a cessé, nous l’avons vu, de présider à l’aménagement du domaine. mais en se souvenant de l’état du parc en 1926, on se rend compte plus facilement du gros effort réalisé en cinq années pour défricher, nettoyer, assainir, un domaine qui sera bientôt et à juste titre, l’orgueil du département de la Seine »[17].

Les grandes eaux peuvent finalement être données en 1935, après une période de travaux extrêmement dense. Ces travaux conséquents ont été à la charge du département de la Seine essentiellement, qui a néanmoins obtenu une aide de l’État. En 1937, l’ouverture d’un musée de l’Île-de-France marque le point d’orgue de cette campagne de réappropriation.

 

Sceaux, les urbanistes et l’exposition de 1937

Le contexte de la reprise, en une douzaine d’années, d’un parc urbain de 220 hectares aux portes de Paris mérite d’être rappelé. Les urbanistes vont suivre tout le processus d’assez près, pendant cette période marquée par une grande effervescence sur les questions d’urbanisme et par la préparation successive des expositions de 1925 et 1937. Urbanistes, spécialistes des questions d’hygiène, des architectes, architectes-paysagistes, hommes politiques, hommes de l’art, propriétaires privés et associations, tous sont soucieux du devenir de ces parcs historiques. Aussi les parcs urbains vont-ils constituer un motif commun et un consensus qui va progressivement s’élargir, à partir de la conviction de quelques-uns.

André Vera (1881-1971), plus connu pour ses jardins privés ou ses ouvrages luxueux, publie en effet dès 1923 une Exhortation aux architectes à s’intéresser aux jardins, laquelle sera reprise dans son ouvrage de 1936, L’urbanisme ou la vie heureuse, avec cette phrase qui connaîtra un certain succès : « La France par l’urbanisme devient un jardin ». Si cette déclaration se veut concept opératoire, elle traduit l’importance que la question des parcs a revêtu pour les urbanistes français.

Un autre personnage important pour le parc de Sceaux est Louis Bonnier (1856-1946). Ce dernier a préparé le premier plan d’extension de Paris, avec Marcel Poëte en 1912. Architecte-voyer de Paris, il est investi dans la protection du patrimoine de la région, au sein notamment de la Commission du Vieux Paris, et il est également membre du comité de rédaction de la revue Urbanisme. Investi dans les activités du Musée social et l’un des artisans de l’Institut d’urbanisme, il est l’un des soutiens actifs du rachat par le département du parc de Sceaux en 1923, tant il est convaincu de la perte que serait le lotissement de ce site historique. On le souligne, la réflexion sur les grands parcs historiques, n’est pas le champ de la seule administration des Beaux Arts, mais occupe les hygiénistes, les urbanistes, les architectes.

Bien sûr, une autre figure essentielle est celle de Forestier, l’un des premiers à avoir étudié, formulé et publié les recherches autour des systèmes de parcs américains, convaincu de la nécessité de s’appuyer sur tous les parcs existants, dont Sceaux. En charge des parcs et promenades de la Ville de Paris, créateur et gestionnaires de nombreux jardins, il pense à l’échelle de la métropole. Dans son ouvrage Grandes Villes et systèmes de parcs, il souligne l’importance des parcs dits suburbains : « Ils ont bien le même but que les grandes réserves, mais au lieu d’être commandés par des circonstances naturelles, ils doivent être plutôt déterminés par les besoins de la ville et régulièrement répartis. Ils sont un refuge à portée des habitants où, dans les tranquilles aspects de scènes naturelles, ils viennent oublier les tracas des affaires, les bruits et le mouvement énervant de la rue. […] Certaines créations très spéciales comptant des cultures ou des jardins, des parcs historiques, Saint-Cloud, Versailles, peuvent être considérées comme parcs suburbains ». Il ne mentionne pas Sceaux dans cet ouvrage, mais, comme on l’a vu, il propose un projet pour le parc en 1924.

Jacques Gréber (1882-1962) est également un protagoniste décisif pour le parc de Sceaux[18]. Personnage central des échanges entre la France et les États-Unis, et de l’enseignement de l’urbanisme naissant, il a la responsabilité de tous les espaces extérieurs à l’occasion de l’Exposition de 1937. Il siège par conséquent de droit dans la brève commission qui cherche à établir une ambitieuse exposition sur l’art des jardins au sein de l’Exposition, en l’installant à Sceaux. D’autres paysagistes sont aussi impliqués dans cette commission réunie sous l’égide du commissariat général de l’exposition entre 1934 et 1935, tels René André (1867-1942) qui a été l’auteur de plusieurs PAEE, ou Achille Duchêne (1866-1947) qui avec ses Jardins de l’avenir pense le parc moderne pour le public[19].

Une fois choisi le lieu principal de l’Exposition, l’hypothèse d’une exposition complémentaire à Sceaux sur l’art des jardins est développée. Il s’agit initialement de présenter des jardins dans le parc, y compris des jardins étrangers, et de jeter les bases d’un musée de l’art des jardins, puisqu’une partie rétrospective aurait été installée dans l’Orangerie. Il était prévu de « faire appel au public pour alimenter l’exposition et la bibliothèque sur l’art des jardins, et offrir tous documents susceptibles de figurer dans ces collections »[20]. Ils cherchent aussi à constituer une projection de photos de jardins, en sollicitant Albert Kahn, la société Lumière.

M.Honnorat, député de la circonscription, et président de la commission, indique que cette entreprise est à long terme, « c’est un programme d’éducation publique, […] l’exposition permet à Sceaux d’hériter d’une bibliothèque et d’un musée de l’art des jardins qui servent de bases à organiser un enseignement annexe à la chaire d’urbanisme et de l’université de Paris »[21]. Lors de la 3e Séance de la Commission Parc de Sceaux, le président insiste pour que ce soit « attractif », et rapporte aussi que « M. Pontremoli estime que l’art des jardins fait corps avec l’Urbanisme et que dans ces conditions, cet enseignement serait plus normalement rattaché non à l’école des Beaux Arts, mais à l’Institut d’urbanisme de l’université de Paris, où les cours, ainsi créés pourraient être suivis aussi bien par les élèves de l’école des Beaux Arts que par ceux de l’école des arts décoratifs, de l’école d’horticulture, etc. »[22] Apparaissent ici de manière transparente les manœuvres stratégiques pour permettre à Sceaux d’hériter d’une bibliothèque et d’un musée de l’art des jardins qui serviraient de base pour organiser un enseignement annexe à la chaire d’urbanisme de l’Université de Paris et, d’un même mouvement, de doubler l’école d’horticulture de Versailles, les Beaux-Arts, et de constituer une connaissance de l’art des jardins qui servirait à l’Institut dans lequel sont engagés Gréber, Bonnier et nombreux autres urbanistes de l’État. Cela montre aussi l’intérêt que ces derniers portent à cette question de l’art des jardins.

 

Un concours est effectivement organisé avec un jury prestigieux, en s’appuyant sur le plan dressé par Azéma qui délimite les espaces du parc de Sceaux où pourrait avoir lieu cette exposition[23]. De nombreuses réponses sont données par différents paysagistes dont André Riousse et Tourry. Le Grand canal est considéré comme un atout majeur, avec la possibilité d’organiser des fêtes de nuit et il semble opportun de noter une certaine similitude dans les formes proposées avec celles dessinées par Achille Duchêne dans son ouvrage paru en 1935.

Ces hypothèses sont étudiées jusqu’assez tard, pour être finalement abandonnées en juin 1935, devant le manque de budget pour la réalisation des jardins prévus, et la constatation qu’il n’y a pas la place nécessaire, outre que les parties prévues au fond du parc auraient été situées trop loin pour attirer le public. Ces réflexions sont néanmoins l’occasion de réinsérer Sceaux dans l’ensemble de ces réserves suburbaines appelées de tous les vœux, au même titre que Versailles ou Saint-Cloud. Après les travaux menés et grâce à la bonne liaison ferroviaire, Sceaux représente un patrimoine précieux, et il est mobilisé dans les réflexions stratégiques sur les parcs suburbains à construire ou à récupérer auxquelles se livrent les acteurs, et les théoriciens, et dont les revues d’urbanisme se font l’écho.

 

Du site protégé à l’espace libre, nécessité d’un système

Les années 1930 voient se multiplier les déclarations sur le besoin de protection des parcs hérités du passé, qu’on ne nomme pas encore patrimoine paysager, en particulier dans leur aspect de composition des vues et des perspectives. Si les urbanistes sont engagés dans le développement des infrastructures de transport, du logement etc, la préservation des réserves leur parait une nécessité. Henri Prost, en particulier, dans une courte note datée de décembre 1932 pour l’établissement du Plan d’aménagement de la région parisienne (1934), indique bien qu’il faut préserver des espaces boisés, « principales réserves d’espaces libres à constituer et au titre de la protection des sites. » Dans son projet finalisé présenté en 1934, des perspectives illustrent les solutions proposées par les urbanistes, et l’un des axes majeurs consiste en la sauvegarde et la protection des espaces naturels, pour lutter contre la « dispersion anarchique des constructions » [24].

Les revues d’urbanisme se font aussi l’écho de ces travaux et consacrent une part croissante aux parcs nationaux et à l’art des jardins dans leurs publications, particulièrement entre 1935 et 1938. Elles n’ont pas de réticence à s’emparer de la question et les traitent comme des espaces essentiels à la vie moderne, à requalifier et à relier. C’est ainsi, en particulier, que la revue L’Urbanisme se penche en décembre 1935 sur le projet de la Route des parcs développé par le ministère des Beaux-Arts, en la personne de MM. Camille Lefèvre et Robert Danis, architectes, membres du Conseil Supérieur des Bâtiments Civils : « Les parcs nationaux de Seine-et-Oise, Meudon et Saint-Cloud, Versailles et Trianon, Marly, et Saint-Germain forment à l’ouest de Paris un seul et incomparable jardin à la  française pour les communes attenantes à ces domaines et pour la capitale ; lieu de repos indispensables au goûts des populations , toujours plus nombreuses de l’Ile de France »[25]. Sceaux n’est pas mentionné formellement mais, jouxtant Meudon, la route prévoit quand même de le traverser. Le projet est centré sur l’aspect des liaisons :

« Il convient de conserver à ce parc du Grand Paris sa belle unité en assurant la liaison des différents jardins qui le composent. Ce résultat ne peut être obtenu que par la remise en état et l’entretien d’une route, réservée autant que possible aux promeneurs et aux voitures légères : route constituée par une suite de belles allées, de grandes avenues, desservant le centre de chacun des domaines et permettant de les visiter à loisir, ainsi que leurs chateaux, d’y jouir de leurs perspectives, comme aussi de passer, avec agrément, de l’un à l’autre à l’abri des voies de grand trafic. Le projet actuellement étudié par l’Administration des Beaux-Arts n’envisage aucune création de route nouvelle ; il indique un parcours existant, à conserver et à rendre entièrement utilisable, grâce à l’exécution des travaux de remise en état de certaines allées devenues impraticables et même menacées de disparition. »[26]

 

Le même article étudie les protections nécessaires pour les perspectives des différents parcs, dont Sceaux, exigeant « le respect et la conservation de ce que le passé a laissé comme grandes compositions à la région parisienne, Marly, Sceaux, Meudon, Versailles et Saint-Germain. Le plan régional n’a porté jusqu’à présent son effort que sur ces 5 sites essentiels. Il poursuit ses études, englobant encore toutes les belles compositions de l’est et du sud de la région, remarquables elles-aussi quoique peut-être moins connues du grand public ».

En février 1936, commentant le plan Prost que ce dernier est venu présenter à la Société française des urbanistes, le rapporteur de L’Urbanisme estime que le gouvernement ne fait pas le nécessaire pour la protection des sites et des paysages, qui fait défaut par exemple à Saint-Germain-en-Laye[27].

Cette attitude de protection et cette conscience que leur caractère historique est à la fois fragile et structurant pour l’espace régional ne fait pas oublier la nécessité de leur utilisation. C’est leur caractère d’espace libre qui les rend précieux pour les usages des Parisiens et des habitants de la banlieue, dans la civilisation des loisirs et du sport en train de naitre.

Il faut à cet égard relire les échanges dès juillet 1923 au sein de la Commission du Vieux Paris à propos de l’achat de Sceaux : « La Commission de l’aménagement de la banlieue a été unanimement d’accord avec l’Administration pour reconnaître l’intérêt exceptionnel que présenterait l’acquisition du domaine de Sceaux par le Département et la conservation à l’état de promenade publique d’une magnifique ‘réserve boisée’ existant depuis deux siècles », tandis qu’un autre intervenant abonde pour dire que cet achat est du « plus haut intérêt du point de  vue de l’hygiène et de l’extension future de Paris, il empêchera une des plus jolies promenades de notre région d’être lotie et saccagée »[28].

Cependant, il s’agit bien de développer le Grand Paris, comme en témoigne le rapporteur de la Commission lors de ces débats : « Je m’empresse d’ajouter que l’acquisition du domaine de Sceaux ne doit pas être uniquement considérée comme ayant pour objet la conservation et l’ouverture au public d’un parc magnifique, dont la superficie égale celle de toutes les promenades inférieures de Paris réunies. Elle doit être envisagée également comme une opération d’aménagement de la banlieue [l’auteur souligne], […], un noyau d’urbanisation bien comprise ». M. Molinié, le même jour, ajoute que le parc serait aussi utilisable pour les Jeux olympiques, « où le magnifique décor naturel dû à une perspective de vallées et de coteaux ombragés eût rendu la manifestation plus imposante encore »[29].

Le thème de la préciosité des parcs historiques pour la région parisienne prend de l’ampleur sur la période considérée. Ainsi en 1936, lorsque Gaston Bardet donne une conférence sur « Les espaces libres ; rôle, hiérarchie, répartition », au Musée social, il évoque longuement les bienfaits de l’espace libre « apte à recevoir de grandes foules, des rassemblements, des fêtes publiques, ce dernier rôle devenant primordial avec la diminution du travail et l’organisation des loisirs […] Il satisfait nos besoins d’esthétique, soit par sa composition soit par les beautés naturelles qu’il préserve ou révèle »[30]. Parmi les grands parcs suburbains qu’il appelle de ses vœux et qu’il faut relier par des parkways, il comprend « également des zones de protection de paysage composés tels que la terrasse de Saint- Germain, ou la perspective du grand axe à Versailles. Ces larges étendues permettent la détente complète, le grand bain de nature, le camping avec son cortège de jeu et de rires, les sports les plus complets si le site est favorable ».

 

Quelle échelle pour les enjeux écologiques et sociaux ?

L’examen attentif des analyses livrées dans les revues d’urbanisme font aussi apparaitre un enjeu nouveau que ces parcs peuvent endosser, celui d’un retour à la nature et à sa dimension écologique.

Ce qui apparaissait comme relativement naturel à des hommes formés au jardin comme Jean Claude Nicolas Forestier ou André Vera – à savoir le caractère vivant et fragile de ces espaces, au-delà des considérations esthétiques ou des nouveaux usages récréatifs – l’est moins pour des architectes ou urbanistes qui raisonnent plus souvent en termes de compositions.

La revue L’Urbanisme développe particulièrement ces points, insiste sur la fragilité de ces espaces, et rapporte notamment en février 1936 les inquiétudes que suscite le plan Prost chez André Vera, qui redoute les effets destructeurs de la population de Parisiens qui viennent se délasser dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye ou dans les bois de Marly ; Vera «  a présenté la défense de leurs arbres, de leurs oiseaux, de leur gibier effarouchés. […] Il craint que les routes qu’on y projette ne préparent leur morcellement ; qu’elles en troublent le repos, et qu’elles en commencent la ruine. La forêt de Saint-Germain est desservie par une demi-douzaine de gares à son pourtour. Il ne croit pas qu’il soit sans danger d’en augmenter les accès »[31].

Cette dimension écologique, peu perceptible en 1928 dans les échanges, émerge ainsi progressivement. Gaston Bardet  exprime, lui aussi, sa préoccupation en 1936 : « Pour lutter dans notre domaine [c’est à dire celui des villes] contre l’envahissement aveugle du machinisme, nous voulons développer un élément vital, un élément de matière animée, l’espace libre, que l’urbaniste Forestier appelait précisément la terre vivante. (…) Les grandes réserves expriment de façon totale le sens de la liberté de l’espace. Elles ont pour mission de conserver des forêts existantes, régulatrices du système des eaux et régénératrices d’ozone naissant, soit de constituer d’immenses lieux de repos. » Bardet liste donc les réserves où « par la suite de l’affluence d’un public trop nombreux, l’humus forestier ou couverture morte de certaines forêts a perdu ses propriétés essentielles. Il faut envisager une régénération artificielle. »[32]

Les urbanistes prennent aussi en considération la problématique d’échelle à laquelle ces parcs sont envisagés et décidés, comme celle de leur utilisation. Cette importance de la bonne échelle de décision était déjà notable en 1923 lorsque les trois municipalités qui s’étaient mobilisées à la mise en vente du parc de Sceaux, avaient sollicité directement le Département pour racheter les terrains. Les urbanistes dont Gaston Bardet ont bien conscience de la nécessité d’un véritable réseau des grandes réserves nationales, militant pour que des parkways –  ils utilisent tous ce mot popularisé par Forestier et Gréber – soient établis d’un parc à l’autre ; en 1938, l’Urbanisme consacre à nouveau un article aux grands parcs suburbains, en étendant encore le réservoir des demeures historiques à considérer dans toutes la région parisienne : « beaux châteaux, beaux parcs qu’il importe de sauvegarder (…) de Chantilly au nord, et autres plus petits parcs.  Dans d’autres directions il en pourrait être de même ; car outre ces parcs existants à sauvegarder, on peut en créer d’autres. À Montreuil, par exemple, la municipalité a acquis le beau parc Montereau qui pourrait facilement être adapté à sa fonction collective » [33].

Les parcs anciens ne sont donc plus considérés comme des réserves foncières mais bien comme des points d’appui pour ce réseau. La dimension historique et la nécessité de sa restauration ne sont pour autant pas niées, mais cette idée d’une contribution à un réseau est intégrée par une large partie des acteurs de ce domaine, des comtes Ernest de Ganay ou Edmond de Fels qui viennent du monde du jardin, jusqu’à l’élu local, « socialiste et internationaliste, Jean Longuet [qui] se réjouissait à la fois que fussent présentés les jardins de tous les pays et manifeste le lien de l’exposition avec l’industrie horticole, si forte dans la région et à Châtenay même, avec notamment les pépinières Croux, attenantes au domaine Chateaubriand de la Vallée-aux-Loups »[34].

Cette unanimité et même ce regain d’intérêt autour de la dimension historique des jardins à intégrer dans le Grand Paris représente à nos yeux une relative surprise, et viennent enrichir la compréhension de la pensée urbanistique, l’acquisition de Sceaux en 1923 et la concomitance des travaux de reprise de ses grands tracés historiques avec les préparatifs des expositions de 1925 puis 1937 jouant probablement un rôle important dans la réflexion des aménageurs sur la place de l’art des jardins.

Alors que les grandes commandes privées se sont progressivement taries après 1918 et définitivement après 1929, les propositions de parcs publics pensés à l’échelle de la métropole constituent le nouvel horizon des paysagistes, et le positionnement par rapport au passé un moteur de renouvellement d’un art du jardin français. Jacques Gréber (1882-1962), dans sa conférence de presse d’avril 1936 largement reprise, souvent textuellement, par les journaux affirme que « l’Exposition ne fera pas revivre le passé. Elle fera œuvre originale en nous apportant la conception la plus moderne de l’art des jardins »[35]. Pour lui, « c’en est fini des grands domaines qui, faute de loi de classement, s’émiettent tous sous le poids d’impôts destructeurs en lotissements utilitaires. Nous ne voyons d’avenir que pour les petits jardins à l’échelle des demeures modestes, ou surtout pour les parcs publics, œuvres de la communauté. Dans le vaste cadre de l’urbanisme, et seulement lorsque l’éducation du peuple et de ses mandataires sera faite, sur l’urgente nécessité d’organiser les espaces, nous voyons une renaissance possible de l’art des jardins adapté à cette application nouvelle. » Les observateurs en concluent alors que « Jacques Gréber et ses collaborateurs indiquent clairement par là leur souci de prouver, à l’exposition de 1937 que cette renaissance de l’art des jardins est non seulement une possibilité mais une réalité. Il était intéressant de souligner que le style qui grâce à eux, prévaudra à l’Exposition prochaine, ne plagiera pas les formules du passé, mais présentera la formule à laquelle elles ont abouti ».

C’est à la même conclusion qu’arrive la Revue horticole dans son numéro spécial, « L’art et la technique des jardins d’aujourd’hui » publié en vue de l’Exposition de 1937 avec des contributions d’architectes-paysagistes – Duchêne, Riousse, Gréber, Duprat, ceux-là même qui étaient investis dans la commission de Sceaux[36] : il ne s’agit plus d’un patrimoine à sauver mais d’un renouvellement profond de l’art des jardins que le modèle américain doit aider à repenser.

Achille Duchêne affirme à cette occasion que « le besoin de mieux vivre avec plus d’espace, plus de loisir, nous gagne individuellement dans les masses et se retrouve dans les collectivités. C’est à quoi tend confusément l’agitation sociale de nos jours. À l’élite intellectuelle revient la tâche de dégager clairement ces aspirations. » Il y voit une invitation à [envisager] l’art des jardins « du point de vue social ; [il] n’a pas seulement à résoudre des problèmes d’esthétique ; il lui appartient de porter à son plus haut point l’influence vivifiante de la beauté du milieu où se meuvent les individus »[37], et comme l’écrit Gréber dans le même numéro, à penser « les jardins dans l’urbanisme ». « Le but devra être toujours le même : assurer le repos et la récréation au plus grand nombre d’usagers. La beauté vient naturellement par surcroît »[38].

 

Figures et illustrations

Figure 1 :

La ville de Sceaux avait déjà investi le haut de l’ancien parc, en particulier depuis l’arrivée du train. « Sceaux, la cité moderne », dans H.L.L. Séris, Sceaux depuis trente ans, 1882-1912, Sceaux, Charaire, 1912, p. 67. © Gallica https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6374811n/f79.item.r=les%20traces%20en%20rouge

Figure 2 :

Les bosquets au nord accueillent dès la fin du XIXe siècle une pratique sportive et de récréation. La Patriote de Sceaux, 23 janvier 1892, Photographie dans Les étapes d’un touriste en France. Tout autour de Paris, 1894.

Figure 3 :

Eugène Atget capture dans une série de clichés de 1925 le lent sommeil dans lequel demeure le parc récemment racheté. Eugène Atget, Parc de Sceaux, Mai 7h matin. 1925. Épreuve positive sur papier aristotype d’après négatif sur verre au gélatino-bromure d’argent. Dimensions H. cm : 22,3  ; L. cm : 17,9  © CD92/ Musée du Domaine départemental de Sceaux. Photographique Pascal Lemaitre. Numéro d’inventaire 94.19.2.44

Figure 4 :

Le Grand Canal est restitué en 1930-1931 au prix de travaux colossaux. Travaux d’aménagement dans le parc de Sceaux, le chantier du Grand Canal. Direction de la voierie de la ville de Paris [1930-1931]. Tirage du négatif sur verre au gélatino-bromure d’argent, Ville de Paris / Bibliothèque historique, NV-002-1094. © BHVP

Figure 5 :

« Bagatelle 37 ». Projet pour l’exposition de 1937, primé lors du concours de 1932. Urbanisme, août 1932, n°5, p. 28.

Figure 6 :

Exposition internationale de 1937. Domaine de Sceaux. Plan d’ensemble, dressé aux Services d’architecture de la Ville de Paris, division des promenades et expositions : 12 novembre 1934, signé de L. Azéma ©F12 12422 copie

Figure 7 :

Sceaux plan de l’exposition de 1937.s.d. [1934] [détail de la proposition d’une exposition sur l’art des jardins]. ©F12 12422 copie

Figure 8 :

Projet de jardin moderne présenté pour l’Exposition Internationale de Paris au parc de Sceaux, par Jean Graef. Dessin dans l’article « Le Style des jardins à l’exposition de 1937 », La Revue de Bagnoles-de-l’Orne et de Normandie. Projet 29 mai 1936. © AN 12 12140

Figure 9 :

La « route des parcs » reliera tous les grands domaines. Schéma publié dans Urbanisme décembre 1936, p. 50.

Figure 10 :

Saint Germain-en-Laye est intégré depuis plus longtemps dans la route de l’Ouest, pour sa terrasse et sa forêt. Carte postale, s.d. © DR

Figure 11 :

La revue Urbanisme soutient la protection des perspectives à Sceaux. Urbanisme décembre 1936, p. 76.
Voir aussi le cas échéant
https://bibliotheques-specialisees.paris.fr/ark:/73873/pf0000856336/v0001.simple.highlight=sceaux.selectedTab=record