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Introduction générale

par Carine Henriot et Clément Orillard

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DOI

10.25580/IGP.2022.0009

Carine Henriot est maîtresse de conférences à l’Université de technologie de Compiègne et au laboratoire AVENUES.

Clément Orillard est maître de conférences à l’Ecole d’urbanisme de Paris et au Lab’Urba, Université de Paris-Est Créteil.

 


La Chine a été présentée depuis le début du XXIe siècle comme l’un des plus grands marchés en matière d’aménagement urbain, porté par les immenses besoins d’une vaste société en transition auxquels ont répondu nombre d’expertises étrangères notamment françaises. Le regard porté sur cette circulation d’expertise est néanmoins toujours limité à la période contemporaine. Pourtant, la Chine est ouverte à l’expertise urbaine étrangère depuis la fin du XIXe siècle et celle originaire de France a joué un rôle non négligeable. Cette journée d’étude a proposé une première exploration des pistes offertes par cette mise en perspective historique, elle reflète l’état d’un travail en cours. Il porte sur l’observation de la circulation de l’expertise, ses acteurs et les structures permettant ces échanges transnationaux, en l’occurrence entre la France et la Chine. Nous avons fait le choix de les aborder sans interroger sur les modèles d’urbanisme eux-mêmes. Toute une littérature s’intéresse déjà à l’impact de la circulation internationale des modèles d’urbanisme sur ces modèles eux-mêmes, sur leurs ancrages locaux, etc.

L’accent est ainsi davantage mis sur les pratiques que sur les discours, à travers la thématique de l’exportation et de l’importation tout en insistant sur la longue durée. Comment les objets construits par et pour la France, dans cette exportation de l’expertise, construisent cet espace transnational et participent d’une réponse à une demande chinoise d’expertise ? Qu’est-ce qui se tisse tout au long du XXe siècle dans ces échanges entre la France et la Chine ? Cette journée d’étude s’inscrit dans la poursuite d’une histoire globale de l’urbanisme qui interroge l’idée de culture transnationale de l’urbanisme, à travers une perspective « institutionnaliste ». Il s’agit d’interroger la dimension internationale d’institutions françaises de formations et d’études en urbanisme dans la poursuite d’héritages nombreux, notamment d’une histoire française de l’expertise urbaine qui s’est tournée plus récemment vers la thématique transnationale[1] ainsi que de la planning history d’origine anglo-saxonne aujourd’hui tournée vers une approche plus globale et transnationale[2] mais aussi de travaux qui durant les années 2000 ont interrogé la circulation contemporaine de l’expertise notamment du côté des réseaux mais pas seulement[3]. Cette journée participe aussi du développement nouveau d’une histoire de la franco-mondialisation, qui cherche à analyser le rôle de la France dans le mouvement de globalisation et de mondialisation[4].

Les échanges entre la France et la Chine en matière de production de l’urbain se sont déployés durant deux périodes différentes qui forment les deux parties de cette journée d’études. Une première débute avec l’ouverture contrainte de la Chine au commerce avec l’Occident et la réaction de l’Empire Qing finissant pour se terminer avec la victoire du parti communiste en 1949. Elle est notamment marquée par la formation en France d’étudiants chinois en architecture, génie civil et urbanisme qu’il s’agit d’éclairer à travers des cas d’études spécifiques. Une seconde période suit la reconnaissance par la France dès 1964 du régime communiste. Elle connait une apogée dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix quand une véritable politique française de coopération en matière d’urbanisme se met en place entre la France et la Chine. Celle-ci a pu jouer un rôle important pour certaines villes, c’est particulièrement le cas de Shanghai qui constitue le terrain privilégié de cette deuxième partie.