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Paroles d’écoquartier : La Vallée perçu(e) par ses aménageurs Extraits de la campagne d’archives orales menée par les étudiant.e.s du master Diagnostic historique et Aménagement urbain de l’Université Gustave Eiffel entre 2019 et 2022

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Paroles d’écoquartier : La Vallée perçu(e) par ses aménageurs

Extraits de la campagne d’archives orales menée par les étudiant.e.s

du master Diagnostic historique et Aménagement urbain

de l’Université Gustave Eiffel entre 2019 et 2022

 

 

Dans le cadre du projet E3S – partenariat entre le groupe Eiffage et l’I-Site Future, dont l’Université Gustave Eiffel – les étudiants du Master Diagnostic Historique et Aménagement Urbain (D.H.A.U.) ont mené entre 2019 et 2021 une campagne d’enquêtes orales auprès de plusieurs aménageurs de LaVallée : l’aménageur – Eiffage, l’architecte – agence Leclercq Associés, l’agence paysagiste – agence Base – et l’assistant à la maîtrise d’ouvrage sur le volet développement durable – Even Conseil, qui ont œuvré conjointement dans ce projet d’écoquartier.

Les entretiens ont été menés entre 2018 et 2021, par trois promotions du master D.H.A.U.. Les enregistrements ont été transcrits par Taurin Bessard et Laura Bouriez Fromentin, et enfin, ces transcriptions ont été révisées par Laura Bouriez Fromentin, ingénieure d’étude recrutée pour le programme E3S.

Ces entretiens constituent un corpus d’archives orales, déposées au laboratoire Analyse Comparée des Pouvoirs (EA 3350) de l’Université Paris-Est et dont les extraits ci-dessous, regroupés en 6 thématiques, permettent de saisir le projet de l’écoquartier LaVallée, ses enjeux et ses ambitions.

 

 

Promotions étudiantes du master D.H.A.U. :

2018-2019

Souad Amiar, Younes Azil, Tahar Azzag, Brahim Belkadi, Taurin Bessard, Dyhia Djebrouni, Mouataz Billah Makloufi, Sara Nessark, Sonia Osmani, Chloé Périchon, Anis Rezgui, Sangyul Song, Farida Yessad, Manal Zaouadi, Hanane Ziane

2019-2020

Lylia Challam ; Timothée Ferré ; Laura Fromentin Bouriez ; Wilfred Gaiwe ; Abdelkrim Goumiri ; Amer Kaci ; Kinza Laifaoui ; Victoria Levillageois ; Samir Memmoud ; Safaa Roudane ; Mikail Selvi

2020-2021 

Mustafa Celebi, Abdelghani Chachoua, Hadrien Farge, Sabrina Hadj Said, Wafa Hammouda, Eloïse Masson, Mouna Rezkallah

 

 

 

I-    Qu’est-ce qu’un écoquartier ? Comment vivra-t-on dans un écoquartier ?

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieure paysagiste de l’Agence Base, le 13 mars 2020

« Je pense que l’écoquartier, c’est un quartier qui est normalement conçu pour que les gens s’approprient vraiment les espaces extérieurs, donc vivent peut-être plus dehors. Là en l’occurrence [plan], il y a des voies résidentielles, qui je pense n’ont pas vocation à être particulièrement fréquentées. C’est pour rentrer chez soi avec sa voiture. Et dès lors qu’on est dans le quartier, on emprunte que les petites venelles, la promenade plantée, la ferme urbaine, le mail, tous les espaces un peu végétalisés et le cours des commerces. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

 « Il y a tellement d’identités d’écoquartier différentes, c’est tellement difficile de dire là oui je suis dans un écoquartier, là non. Mais les choses qu’on peut quand même citer c’est que pour quelqu’un qui se promène, pas quelqu’un qui est dans son logement, mais pour quelqu’un qui se promène ça se caractériser par la présence d’espaces verts qui sont généreux, par le fait que la gestion des eaux pluviales soit à ciel ouvert et gravitaire, c’est-à-dire qu’on a pas de canalisations bétons, on va voir les eaux qui sont retenues sur la promenade plantée par exemple. Le quartier est censé être apaisé, puisque on aura une favorisation des modes doux, notamment sur toutes les venelles internes du quartier. Y’aura absolument pas de circulation routière sur la promenade plantée. On aura vraiment des espaces généreux pour les piétons et les vélos, et puis cette proximité au tramway qui fait aussi qu’on va encourager les habitants à l’utiliser. Et puis après la proximité des aménités et services dont on parlait, qui fait qu’aussi on va favoriser un mode de déplacement à pied. Du coup, je pense que ça peut être ça qui fait qu’on va ressentir qu’on est dans l’écoquartier, c’est le fait qu’on soit sur un espace qui est plutôt apaisé, avec une place qui est généreuse pour les piétons et les vélos, avec des espaces verts qui sont généreux, avec un confort climatique qui est bien géré y compris l’été et l’hiver, et puis avec des lieux de vie sociale qui sont visibles, des espaces qui vivent, que ce soit au niveau de la ferme urbaine, de la promenade plantée, des petits commerces. »

 

 

 

II-  Quels sont les enjeux du projet ?

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« [En quoi cet écoquartier est particulier pour Eiffage ?]

Alors il est particulier parce qu’Eiffage a décidé d’en faire un élément particulier. En fait, Eiffage se rend compte que pour qu’on puisse changer les pratiques notamment en termes de durabilité le mieux c’est de faire. Donc régulièrement depuis 10 ans, Eiffage a décidé de choisir des opérations qu’il décide d’être le démonstrateur. Et là, il essaie d’aller au bout de logiques de changement de pratiques. Donc le premier démonstrateur c’était Smartseille, l’écoquartier à Marseille sur lequel il y a eu tout un travail qui a été fait sur le foisonnement des parkings, sur la conciergerie de quartier, sur une boucle thalassothermie basse température avec la mer, etcetera. Donc ça a permis de voir les difficultés. On a fait la dépollution par champignons, c’est possible mais on s’est rendu compte qu’il fallait faire ça par des petits caissons, comme les petits caissons ça prenait de la place il faut qu’on fasse ça plutôt quand on a beaucoup d’espace. Châtenay Malabry c’est le deuxième démonstrateur du groupe. Smartseille c’était 3 hectares, LaVallée c’est 20 hectares. Donc il y a un effet d’échelle qui est un peu différent. On peut faire bien sur un bâtiment mais faire bien sur vingt bâtiments, on se rend compte qu’à un moment ça alors par contre ça crée un marché. […] Donc il est différent parce qu’on a décidé d’y mettre de l’énergie, de la réflexion, voire de l’argent pour faire quelque chose d’un peu différent. C’est un enjeu du groupe, c’est un enjeu aussi pour montrer aux villes qui demain voudraient faire un quartier différent « Bah nous on veut bien essayer avec vous. ». Donc tout est dans une logique où on propose une stratégie, on propose des solutions et on choisit ensemble des points sur lesquels on va aller plus loin. C’est les fameux totems dont je vous ai parlé. Ça c’est un discours en disant « On a envie de faire, on va mettre les moyens pour le faire. » Après des fois c’est plus compliqué, ça ne dépend pas que de nous, ça dépend des banques, des assureurs et compagnie. En tout cas, on veut développer cette envie de dire « Il est important parce que 2050 c’est demain. ». Donc aujourd’hui il est important de dire que nos bâtiments devront subir pus de chaud, plus de froid, peut-être plus de voitures, moins de voitures, moins d’électricité, plus d’électricité. Donc il faut forcément qu’on développe une nouvelle façon de faire la ville. »

 

« [Quels sont vos objectifs en tant qu’Eiffage de ce projet ?]

En tant qu’Eiffage, c’est d’en faire un démonstrateur, que tout le monde le trouve super joli, que les Chatenaisiens soient fiers de cet écoquartier, que les habitants du quartier aient envie d’y rester et qu’on montre que derrière il n’y a pas de déficit. On montre que c’est possible et qu’innovation n’égale pas surcoût. »

 

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« Pour l’équipe Eiffage, c’est de créer un écoquartier démonstrateur de ville durable. L’objectif c’est de réaliser des choses. Alors il y aura des choses qui seront un peu exceptionnelles. Moi je coordonne une équipe de chercheurs, dont vous faites partie, où il y a des choses vraiment exceptionnelles qu’on ne fait jamais d’habitude. Typiquement ça, on l’a jamais fait. Après on verra comment ça alimentera nos réflexions, comment ça alimentera nos offres, comment est-ce que les réalisations à travers ces ateliers de recherche vont proposer des objets qu’on pourra revendre entre guillemets, pour développer des innovations dans d’autres quartiers. Donc ça c’est la partie exceptionnelle du projet. Et je pense qu’il y a aussi une partie, ce que je vous disais, de réaliser des choses reproductibles, de montrer que justement ce n’est pas que dans des quartiers un peu exceptionnels qu’on peut faire des choses, qu’on peut mettre en œuvre des choses. Typiquement, on a créé une plateforme de réemploi sur le site. On a déconstruit de manière sélective des choses. Il y aura de l’insertion qui va être réalisée pour remettre à neuf les équipements, les lampadaires, les escaliers, de la menuiserie, de la couture. Ça, ça ne coûte pas d’argent en fait. Ça ne coûte rien, c’est juste de l’organisation et ça se valorise hyper bien auprès des collectivités : ça permet de créer de l’économie, ça permet de créer du lien social, ça permet d’éviter des mises en décharge. C’est que du positif. La seule contrainte c’est que ça prend un peu de temps et qu’il faut réfléchir. Et en vrai, ça s’est fait à Châtenay, mais je pense que c’est reproductible dans beaucoup d’endroits. Et cette expérience de Châtenay va permettre de mettre en place des procédures et on sait que c’est faisable, on sait combien ça coûte, on sait à quel moment il faut s’y prendre, on connait les acteurs avec qui il faut travailler. Donc c’est de l’apprentissage, beaucoup d’apprentissage. Des sujets comme ça il y en a plein. Le réseau de chaleur pareil, on a beaucoup appris. Sur le mode constructif, on apprend beaucoup. Pour moi, c’est vraiment capitaliser toute cette expérience-là pour après essayer de développer des bonnes pratiques. Ça c’est l’enjeu Eiffage mais point de vue développement durable. Après point de vue entreprise, c’est aussi de créer de la valeur. »

[De mettre en valeur peut être l’identité de la ville parc de Châtenay ?]

« Ça c’est en répondant à l’appel d’offre, mais en vrai Eiffage lui son intérêt c’est de gagner un marché, faire des logements, que la Route vienne travailler, que Eiffage Energie vienne travailler, ça c’est vrai. On n’est pas des philanthropes. C’est une entreprise, ça passe à travers ça. Après c’est une fierté de dire que la ville-parc on y a répondu, et que la ville nous a fait confiance, et qu’on va réaliser quelque chose qui répond à cette confiance. Qu’on va avoir cette promenade plantée, qu’on va avoir cette ferme urbaine, vraiment une nature en ville très forte. Ça sera une fierté mais, est-ce que c’est un objectif ? Oui, c’est un objectif. Il y a les quatre axes dont je vous ai parlé. L’objectif c’est de réaliser concrètement des choses. C’est d’arrêter d’être dans l’incantation et de dire « Je vais vous faire du bas carbone. » Et puis après tu ne sais pas trop ce que ça veut dire. Donc c’est aller au-delà des barrières. C’est dire : « Oui c’est peut-être plus compliqué de mettre du bois et du biosourcé dans nos logements ». Là, on a eu des échecs. Déjà sur la première phase, tout le monde est dans le béton parce que c’était trop cher. Mais ça veut dire que sur la deuxième phase, on va redoubler d’efforts pour vraiment montrer que c’est réalisable. A quel coût ? Si on voit que c’est vraiment très très cher, on va réfléchir au développement d’une filière qui va permettre de proposer ça moins cher, que la mise en œuvre soit peut-être plus simple. Lever tous les freins qui existent, mais tant qu’on ne les a pas atteints on parle de choses qu’on ne connait pas. Donc c’est vraiment essayer d’avancer là-dessus. »

 

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« [En quoi cet écoquartier est particulier pour vous et pour Eiffage ?]

C’est un quartier démonstrateur qui veut montrer tous les, tous les savoirs faire du groupe Eiffage. Donc, on est très soutenu par les différentes branches. Comme je vous expliquais au début Eiffage a plusieurs activités, donc ici on a réussi à faire travailler Eiffage Route, sur la réalisation des infrastructures, il y a Eiffage Energie qui nous accompagne sur la mise en place d’un réseau de chaleur urbain. Donc, c’est un territoire de jeu pour montrer les savoirs faire d’Eiffage. Donc ça, c’est vraiment très important aussi. C’est-à-dire qu’on veut qu’on puisse dire : bah regardez tout ce qu’on sait faire puisqu’on l’a fait là à cet endroit-là, à grande échelle et en vrai. Pas seulement dans un labo. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« C’est un projet qui est connu depuis plusieurs années parce que ça fait un bout de temps qu’on savait que l’Ecole Centrale, l’Ecole d’ingénieurs, Centrale Paris, allait déménager sur le plateau de Saclay, on le savait. Et donc il y a l’ancien territoire historique à Châtenay Malabry, avec ses vingt hectares qui allait être rendu disponible. Donc, la mairie avait une solution, c’était de tout vendre en petits morceaux et puis il y aurait eu des promoteurs immobiliers qui se seraient installés, chacun se serait battu pour payer le prix du foncier le plus cher possible. La mairie aurait vendu au plus offrant et puis il y aurait des promotions immobilières qui seraient sorties. Ce n’est franchement pas ce que la mairie voulait faire. Donc la mairie s’est dit « on a vingt hectares ». C‘est exceptionnel vingt hectares en région parisienne, je peux vous dire c’est juste de la folie pure. Vingt hectares ! Le premier écoquartier qu’on a fait, nous, il fait deux hectares, six à Marseille. Là, on est sur vingt hectares. Et là vous commencez à pouvoir faire des choses intéressantes : un réseau de géothermie ça commence à devenir rentable, si c’est pour trois immeubles ce n’est pas possible, pour vingt hectares ça a du sens.

[C’est un potentiel foncier.]

Un potentiel foncier très important, des projets en trois phases qui vont tangenter quand même le milliard d’euros d’ici 2023, c’est monstrueux en termes d’investissement. Si vous ajoutez tout ce qu’on y fait : l’achat du foncier, les réseaux de chaleur, les voiries, les bâtiments, la ferme urbaine, tout, la gestion des eaux usées, la gestion des déchets, on va tangenter le milliard d’euros. Donc, ce qu’il faut que vous reteniez c’est que pour la première fois dans un projet d’aménagement urbain on a à la fois un espace suffisant, un délai suffisant, 2019-2024, six ans pour faire du bon boulot, et deuxième sujet, un investissement important et ça ce n’est pas souvent qu’on a les trois éléments en même temps. Donc, la mairie a dit « on ne va pas faire n’importe quoi, on ne va pas tout découper puis vendre par petits bouts, on va faire un grand écoquartier qui a du sens, qui a sa propre cohérence ». Donc ils ont consulté, c’est nous qui avons gagné et on a créé, et ça c’est important que vous le notiez, on a créé la première structure juridique innovante en France, où on a créé une structure qui s’appelle une SEMOP, donc c’est une Société d’Economie Mixte à Objet Particulier. Alors c’est un statut législatif que le législateur a créé en 2014. Mais c’est la première fois, en général c’est utilisé pour la gestion de l’eau et la gestion des déchets. C’est la première fois que c’était utilisé pour un écoquartier, pour un aménagement urbain. Donc on a créé cette SEMOP avec 51% qui est détenu par Eiffage, 34% qui est détenu par la ville et 16 % par la Caisse des dépôts. C’est vraiment intéressant, parce que si vous voulez on est en partenariat avec la puissance publique. Ça garantit que, nous, on ne fasse pas n’importe quoi, enfin moi je n’ai pas envie de faire n’importe quoi mais imaginez je m’en vais, enfin, je ne sais pas, il y a plein de sujets qui peuvent faire qu’à un moment donné sur un pas de temps aussi long il y a des choses qui peuvent bouger. Donc la puissance publique elle reste dans la SEMOP pour vérifier qu’on avait dit qu’on faisait un réseau de chaleur géothermique, on va le faire, on avait dit qu’on serait précurseur sur les labels de performance énergétique, on va le faire. Donc tout ça il y a un regard permanant de la puissance publique. Ce n’est pas parce qu’on a acheté le terrain qu’on y fait ce qu’on veut. Donc ça c’est intéressant parce que jusqu’à présent dans l’arsenal juridique français il n’y avait pas beaucoup de statuts qui permettaient ça. Il n’y en avait pas en fait. Le seul statut c’était la promotion immobilière, mais c’est ce que je vous dis, vous achetez le terrain vous faites ce que vous voulez dessus. Donc là sur vingt hectares ça avait vraiment du sens de faire un démonstrateur de savoir-faire en développement durable qui associe, encore une fois, tout le monde : les urbanistes, les architectes, là on travaille sur le bois, on travaille sur la terre crue, on est en train de recarbonater des bétons […]. Donc, on teste des choses qu’on a jamais faites. On partage le risque aussi, et c’est aussi pour ça que ma direction est impliquée, parce que nous on a des fonds d’intervention pour soutenir l’innovation. Et puis, c’est pour ça que vous êtes impliqués. C’est pour ça que on s’est tourné vers la future université Gustave Eiffel, on a travaillé avec Pierre Perrin […] qui est un jeune qui sort de master, il n’est pas plus vieux que vous, je crois, peut-être un an ou deux mais pas plus, qui est dédié au projet. Moi j’ai mis aussi quelqu’un dédié au projet, et puis on a commencé à recenser les sujets qui étaient intéressants. Et donc les professeurs de l’université, enfin de l’UPEM mais aussi de l’ESIEE, de l’EAVTT, etcetera, ont regardé les sujets. Pour eux c’était nouveau, parce que nous on arrivait on disait « voilà nous on aimerait bien travailler sur disons des archives, … on aimerait bien travailler sur un atelier d’écriture sur l’histoire du quartier, on aimerait bien sur la recarbonatation des bétons avec l’IFSTTAR, on aimerait bien travailler sur les îlots de fraicheur avec l’ESIEE ». On a mis sur la table tout ce qu’on avait envie de faire avec du budget, ça a été un peu une bourse aux projets et les profs qui étaient intéressés on dit « ok, moi j’y vais, je mets des étudiants dessus ». Donc nous on était content car ça permet aussi, à mon avis, aux étudiants de travailler sur un projet en dur, un projet qui va sortir de terre et où ils pourront dire « bah moi j’ai travaillé là-dessus, j’ai fait ci, j’ai fait ça. » Ça leur permet d’avoir une vraie vision de l’intérieur de la construction de la ville et de ce que ça veut dire pour les habitants et je crois que c’est dans le cadre de votre master qu’on travaille sur la recréation d’une certaine confiance entre les riverains et les institutionnels dont on fait partie en fait. Parce qu’à chaque fois ils se disent « bah ils nous ont dit qu’ils feront ci, ils feront ça, mais ils feront bien ce qu’ils veulent ». Donc l’idée c’est de montrer que non, on ne fait pas ce qu’on veut et on fait ce qu’on a dit et ça c’est important de recréer cette confiance. Donc c’est des sujets qu’on est pas, en tant qu’entreprise, toujours armés pour traiter tous seuls. Et d’abord par ce qu’on est nous-même formatés par notre expérience de l’entreprise. Donc c’est important que vous ayez vous un regard extérieur, indépendant, avec vos professeurs qui sont spécialistes et vous, vous êtes neufs sur le projet. Enfin neufs, vous avez des yeux neufs sur le projet et donc ça vous permet de percevoir des choses que nous on ne verrait plus parce qu’on est tellement habitués qu’on va pas le voir. Donc c’est votre rapport d’étonnement, si je puis dire, qui est important pour nous, aussi. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ancienne directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, le 2 mai 2019

« On fait partie du groupe Eiffage, on adhère complétement, en tant qu’aménageur, aux ambitions du groupe Eiffage en matière de développement de la ville durable, la ville à haute qualité de vie. Donc travailler sur ce projet c’était nous permettre de développer les innovations du groupe Eiffage en la matière. C’était un beau terrain de jeu, ça nous permettait de rendre opérationnel nos innovations. Ce qu’il faut savoir c’est que dans le groupe Eiffage, depuis au moins 10 ans, il existe un laboratoire qui s’appelle le laboratoire Phosphore. C’est un laboratoire qui a été mis en place par la direction du développement durable d’Eiffage pour travailler sur la ville de demain, à l’ambition 2030-2050, sans contraintes et pour réfléchir à ce que pourrait être cette ville. A ce laboratoire, certains membres d’Eiffage Aménagement y ont participé. Des représentants de tous les métiers du groupe y ont participé pour réfléchir à ces innovations. Aujourd’hui, il s’agit de rendre les choses opérationnelles. Une première expérience s’est faite, enfin ça se fait sur de nombreux sites, mais à une certaine échelle en matière d’aménagement ça s’est fait à Marseille. On appelle le quartier Smartseille, qui effectivement était le premier laboratoire de la ville durable chez Eiffage. Aujourd’hui la direction dit : « C’est Châtenay, Châtenay doit être le vaisseau amiral de la ville durable, doit être la vitrine de nos innovations ». Notre particularité c’est effectivement de s’être dit : « Ce terrain de jeu c’est 20 ha, cette portion de ville à faire évoluer, on doit, nous, permettre effectivement de renforcer nos savoirs-faires et nos métiers du groupe Eiffage en matière d’aménagement, de promotion immobilière, de construction et autres activités. »

 

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« Dans la partie programmation pour Eiffage Aménagement et le groupe Eiffage en règle générale, ce projet est le démonstrateur du groupe. Après les travaux sur Phosphore qu’est le laboratoire de la ville durable d’Eiffage initié en 2007, puis l’opération de Smartseille, donc à Marseille, l’écoquartier LaVallée est le troisième démonstrateur de la ville durable by Eiffage avec énormément d’innovations. L’idée c’est d’en faire un laboratoire, mais qui ne soit pas juste un travail où on viendrait pluger des innovations qui ne feraient pas sens. Donc lorsque l’on avait répondu avec les équipes de la direction développement durable et de l’innovation transverse d’Eiffage, on avait travaillé à la mise au point d’une logique innovation, d’un parti pris qui était axé sur quatre points forts, la première partie c’était le sujet énergie bas carbone, le deuxième était sur la partie économie circulaire, la nature en ville et le quatrième la partie nouveaux usages, nouveaux usages, smart-city, etc.

Sur la partie énergie carbone, l’idée c’était de travailler sur un réseau de chaleur, de travailler sur notamment l’approche carbone avec une logique de chantier qui abaissait notamment les circulations de camions, sur une logique de formulation des bétons qui permettait de diminuer par quatre l’impact carbone des ciments, de travailler sur les modes constructifs innovants, sur des systèmes de performance des bâtiments qui puissent jouer en faveur justement de la frugalité architecturale d’une manière générale. Donc ça, c’était le premier point.

Sur la partie économie circulaire, l’idée c’était de travailler sur le recyclage des bétons, 100% des bétons. J’en ai rapidement parlé, l’idée c’est effectivement de se servir de ces bétons-là pour à la fois créer les assises de voirie, les structures, mais également pouvoir injecter 30% de granulats sur la phase une et la phase deux, 30 % de granulats recyclés dans la formulation du béton, ce qui aujourd’hui est le maximum que la norme puisse nous autoriser. Et l’idée c’est en première phase puis en deuxième phase, donc en première phase réaliser des éléments type poteaux, poutre ou voile en 100% recyclé et en deuxième phase d’avoir complétement un bâtiment complet, un lot complet de plusieurs centaines de logements sur cette partie en super structure. Donc l’idée c’est de venir travailler avec une centrale à béton sur place. C’est nous qui menons les consultations avec les services achats gros œuvre d’Eiffage Construction, pour désigner le centralier qui aura la meilleure proposition dans le cadre d’une formulation de béton, qui puisse aller dans le sens de la performance environnementale et innovante du projet.

[…] On a ce premier point-là, on a un deuxième point qui est le réemploi. Dans le cadre des travaux de déconstruction, on a mis en place des opérations de curage et on a associé une association qui s’appelle RéaVie, qui est pilotée par un conducteur de travaux d’Eiffage Amélioration de l’habitat, […], qui dans le cadre de ses chantiers s’est rendu compte que dans le cadre de la réhabilitation, il y avait énormément de matériaux de second œuvre qui partaient à la benne, alors pour autant on avait la possibilité de les massifier, de les reconditionner voire de les transformer pour leur donner un nouvel usage ou en tout cas une seconde vie. Sur Châtenay, on a pris le parti d’y aller à fond dans cette démarche-là. On a récupéré 60 tonnes de matériaux de second œuvre. Alors ça va des poignées de porte, des portes, des blocs de secours, des luminaires, des prises électriques, des chemins de câbles. C’est vraiment tout l’équipement du second œuvre des bâtiments et notamment l’élément phare c’est la dépose méthodique des 1 200 places des amphithéâtres de Centrale, donc il y avait sept amphithéâtres, qui ont été déposées méthodiquement et qui ont été envoyées au Sénégal pour équiper une université à Sine Saloum, à 200 km de Dakar, et qui a permis le 4 février dernier de permettre la rentrée scolaire de 1 000 étudiants dans le domaine de l’agronomie. Donc ça c’est l’élément fort du projet, sachant que l’idée c’est effectivement qu’on a sur site une plateforme solidaire qui du coup a travaillé justement ces différentes étapes de massification, de reconditionnement et de transformation. Les idées étant de pouvoir vendre aux Châtenaisiens, enfin au grand public ou à des institutionnels, ces équipements pour équiper par exemple les écoles, ou équiper son logement avec des lampes un peu industrielles. C’est ce type un peu de choses qui sont imaginées. Donc ça c’est sur la partie économie circulaire.

Sur la partie nature en ville il y a trois volets. Le volet agriculture urbaine, le projet présente une ferme d’un hectare avec un exploitant. Aujourd’hui on travaille avec Mugo qui est une mission de programmation de la ferme. L’objectif étant de produire plusieurs tonnes de légumes notamment par an pour venir alimenter la cuisine centrale et alimenter le groupe scolaire, qui fera face à la ferme urbaine pour vraiment travailler en circuits courts. Donc ça c’est le premier point. Le deuxième point, c’est le travail sur la biodiversité, nous travaillons notamment avec la ligue de protection des oiseaux, la L.P.O., pour mettre en place tout un plan d’action en matière de gestion, de prévention et de valorisation de la biodiversité à la fois en amont du projet mais aussi pendant la phase travaux. Et donc on a un suivi sur 10 ans avec la L.P.O. qui permettra de mettre en avant les aspects biodiversité. Et puis après, on a la partie environnement réglementaire qui elle va plutôt s’orienter autour de la zone humide qui existe sur le site qui va être détruite puis compensée. Aujourd’hui la zone humide qui existe est une zone humide liée à une artificialisation des sols, et on va recréer une zone humide qui fait à peu près 250 m². On va en recréer une qui fera un peu plus de 750 m² avec un véritable potentiel écologique. Puisqu’on a vraiment défini et travaillé sur le projet des espaces publiques en intégrant la biodiversité au cœur de la conception.

Et enfin le dernier point. On va travailler sur les nouveaux usages à travers la smart city, la maquette numérique, la e-conciergerie, le challenge énergétique. Voilà c’est des sujets, les nouveaux usages, que l’on porte notamment sur les nouveaux modes de mobilité. Tous les modes doux, les modes alternatifs, de sorte à pouvoir laisser la voiture à l’extérieur du quartier. Voilà un petit peu le cadre général dans lequel on mène toutes nos actions. » »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

« [Qu’est-ce qui a justifié le choix de vouloir faire un écoquartier ?]

Je pense, alors c’est un peu compliqué parce que je ne suis pas forcément à la place de la collectivité. Je pense qu’ils en parleront mieux parce que c’est vraiment d’eux qu’émerge la demande. Mais, je pense que la collectivité, et aussi derrière Eiffage Aménagement puisqu’ils font beaucoup de choses sur ce projet-là, ont la volonté de faire un projet qui a vraiment une qualité environnementale plus poussée que ce qu’on peut voir classiquement on va dire. Donc, il y avait l’envie de mettre ce projet un peu comme un laboratoire d’expérimentation, d’innovation, sur lequel ils pourraient tester des choses sur certains sujets qui ne sont aujourd’hui pas forcément bien maîtrisés dans la construction, l’aménagement. Et je pense du coup, cette labellisation « écoquartier » c’est un atout pour établir une stratégie qui soit cohérente, globale, sur pleins de sujets, et puis aussi pour être reconnu en tant que tel, puisque c’est aussi un label qui est connu. Donc je pense que c’était une volonté d’aller chercher des choses qui sont un peu nouvelles et du coup aussi d’avoir une stratégie globale qui est aussi cohérente et qui est éthique aussi, visible et compréhensible par les habitants. »

 

 

 

III-   Faire la ville d’aujourd’hui et de demain : évolution des professions et des savoir-faire

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« La société Eiffage c’est une société qui a plusieurs métiers – les métiers historiques sont les métiers de la construction, de la route et des équipements. Donc historiquement des métiers de faiseurs de la ville et donc du bâtiments travaux publics, B.T.P.. – et qui aujourd’hui se développe aussi dans un ensemble de filiales qui sont liées à la démolition, à l’énergie et, depuis 30 ans, à l’aménagement. Alors l’aménagement c’est travailler, justement, en amont des projets de construction d’infrastructures pour définir avec les collectivités les conditions pour mettre en place les projets. Donc, c’est un métier qui est plus historiquement public, souvent porté par des sociétés d’économie mixte ou porté directement par les villes, et qui aujourd’hui se développe de plus en plus par le privé du fait des projets, du fait de la complexité aussi des projets. Ce qui fait qu’aujourd’hui un groupe comme Eiffage, qui développe beaucoup de métiers, apporte une réponse globale aux préoccupations des villes. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« [Et quelles sont les grandes missions de votre service ?]

Alors la mission principale c’est de mener à bien la stratégie développement durable et carbone du groupe. Ça parait un peu abstrait dit comme ça. C’est vrai que c’est compliqué parce que nous on n’est pas sur le terrain, on soutient des équipes opérationnelles. Notre mission c’est d’avoir toujours un temps d’avance sur la réglementation, sur nos concurrents, sur comment faire pour différentier une offre, l’améliorer, être vertueux. Ça c’est nos missions principales, à travers des outils, à travers des soutiens de veille réglementaire, à travers de la communication en interne pour expliquer quelles sont les bonnes pratiques, à travers l’accompagnement dans les appels d’offres. C’est très très varié, on fait des motion design, on fait des tours en région pour expliquer un peu quels sont nos métiers, on accompagne les équipes dès qu’elles ont un problème réglementaire, on les accompagne si elles ont des problèmes de justice par exemple ou d’association de riverains, nous on les accompagne pour expliquer les projets, pour leur expliquer comment il faut être le plus transparent possible sur nos projets et comment il faut anticiper au maximum pour éviter d’avoir des problèmes a postériori. Qu’est-ce qu’on fait d’autre ? On fait des outils pour l’innovation, des outils vraiment pour les gens que les gens se les approprient et les utilisent pour améliorer leurs métiers. Voilà, c’est les missions principales et là la grosse mission maintenant en ce moment c’est d’accompagner notre stratégie bas carbone, qui est vraiment le point d’entrée de notre PDG. Il veut qu’on ait une vraie stratégie définie que tout le monde connaisse et qu’on fasse un peu évoluer nos métiers pour répondre à cette stratégie. Voilà notre but, c’est un peu accompagner la conduite du changement. Aider les personnes à ouvrir leurs charcas, comprendre que notre modèle de base c’est pas forcément le plus pérenne et du coup pouvoir offrir d’autres options que les choses qu’on fait depuis 100 ans. C’est un peu ça notre mission. »

« [Vous avez inventé un nouveau quartier à haute qualité de vie afin de répondre efficacement et de manière innovante aux besoins des collectivités et aux attentes des habitants, en faisant de cet espace un véritable lieu de vie emblématique. Quelle est la spécificité de ce projet vis-à-vis des autres projets en ce moment innovants que vous avez réalisé auparavant, exemple le projet Smartseille à Marseille ?]

« Alors on l’a conçu mais on ne sait pas ce que ça va être quand même. Smartseille c’est en train d’être réalisé. Smartseille ça a été notre premier démonstrateur comme on l’entend. C’est-à-dire qu’en fait dans l’histoire de notre réflexion sur la ville durable chez Eiffage, on a travaillé pendant plusieurs années de suite sur Phosphore qui est un laboratoire d’innovations. On l’a appelé laboratoire donc les gens « C’est génial », mais on n’a pas de blouses blanches, de tubes à essais, c’était vraiment que de la prospective, que de l’imagination. On se mettait dans un scénario futuriste avec une pression carbone, avec une pression du carbone, de la taxe carbone, une pression démographique, une pression du milieu, avec plus de tempêtes, plus d’inondations, plus de sécheresses. Et on s’est dit « Comment on conçoit une ville à travers ces axes ? ». Donc il fallait forcément se mettre dans un territoire. Ça a commencé à Marseille. Après on a travaillé à Strasbourg et on a travaillé à Grenoble. Et de là, on a fait des groupes de travail mélangés, des vieux, des jeunes, des filles, des garçons du groupe Eiffage, de tous les métiers et des gens extérieurs : des économistes, des sociologues, des architectes, des urbanistes qui ont réfléchi un peu à comment faire pour que notre ville soit une ville qui ait le moins d’impacts possible, qui soit résiliente des enjeux climatiques, qui soit pérenne dans le futur. Donc tout ça, ça a apporté plein de réflexions parfois vraiment futuristes, science-fiction on va dire. Et très rapidement on s’est rendu compte qu’il y a beaucoup de choses qu’on avait imaginé qui étaient en fait en train d’éclore physiquement parlant. Et au final à Marseille, l’aménageur urbain nous a dit « On a bien aimé votre programme, voilà vous avez un terrain. Vous pouvez l’acheter. ». C’était un terrain avec un très gros enjeu social parce qu’il est dans le quartier l’un des quartiers les plus pauvres d’Europe et il est juste à la frontière entre le centre-ville de Marseille et le quartier nord. Donc l’objectif de ce quartier, de ce nouveau quartier c’est de vraiment créer du lien entre le quartier nord et le centre-ville. Donc c’est un quartier, en vrai tu passes tu n’as pas envie d’y habiter. Mais donc l’objectif c’était de créer un démonstrateur de l’innovation, de la ville durable et en plus tout ça dans un contexte économique difficile. Donc Smartseille, ils ont essuyé les plâtres comme jamais. Je les remercie s’ils écoutent ça dans 50 ans, sachez que vraiment moi je me sers beaucoup de leur expérience. Et sauf que bon c’est deux hectares et demi, là on est à huit fois plus grand. Donc il y a d’autres échelles qui sont en jeu. On est à 10 minutes du campus Eiffage, on est à côté de Paris donc il y a d’autres enjeux qui sont un peu différents, mais Marseille on se sert vraiment beaucoup beaucoup d’eux, de Smartseille, pour voir ce qui est réalisable, ce qui ne l’est pas. Et j’espère qu’on fera pareil avec LaVallée sur nos futurs écoquartiers pour dire « Attends ça on sait que ça va être un peu compliqué, dans notre contexte ça n’a pas de sens, ça on le prend direct, on remet le paquet, on prend le cadeau, on refait, ça marche super bien les gens se le sont approprié, ça ne nous a rien coûté et en plus on a apporté des choses. Ou même si on a investi on sait pourquoi on investit. » Donc, voilà, j’espère que le quartier pourra permettre ça. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« Vous êtes ici dans une direction où on travaille qu’en management de projet. C’est-à-dire qu’il n’y a personne qui est propriétaire d’un dossier. Et nous avons ici des collaborateurs de tous profils. Ça peut être des ingénieurs, ça peut être des universitaires, ça peut être des urbanistes, ça peut être des architectes, ça peut être des gens qui sont versés dans les sciences politiques ou les sciences sociales. Et de tous âges. Et cette direction expérimentale elle ne travaille qu’en mode projet. C’est-à-dire qu’en fonction du projet, on constitue l’équipe qui sera la plus à même d’apporter la bonne réponse aux entités opérationnelles. Vous avez à peu près les trois quarts, là cette direction fait une trentaine de personnes, et vous avez à peu près 24 personnes qui ne travaillent que sur les appels d’offre. Donc, le travail c’est de trouver les meilleures solutions du point de vue de la réduction de l’empreinte carbone, du point de vue de la protection de la biodiversité, du point de vue de la construction durable, du point de vue des écomobilités, enfin je vous donnerais tous les sujets, c’est-à-dire toutes les briques constitutives de la ville durable. La ville durable ce n’est pas qu’un bâtiment énergie positive avec un bus au diester au milieu, c’est beaucoup plus compliqué que ça. Ça commence par l’aménagement, ce n’est pas à vous que je le dirais, vous le savez bien, et ça nécessite que toutes les compétences qui travaillent sur la ville se parlent. Et malheureusement dans la vraie vie ça ne se passe pas comme ça. Il y a trop de silos, trop de séparations et en fait les compétences, qui sont toutes complémentaires, elles n’interagissent pas en même temps. C’est ce qu’on essaie de créer ici, de faire en sorte que les compétences complémentaires puissent interagir au bon moment. »

« L’innovation transverse, qu’est-ce que c’est ? Dans un groupe d’ingénieurs comme Eiffage, beaucoup de gens font de l’innovation. Il y a beaucoup de directeurs de l’innovation, d’ailleurs, ou de directeur technique ou de directeur scientifique. Donc nous on n’a pas la prétention de diriger ces gens-là. Il y a tellement de métiers chez Eiffage entre l’énergie, la route, le génie civil, la construction immobilière, la construction en métal, les concessions autoroutières, c’est-à-dire les métiers sont tellement différents c’est impossible d’avoir un directeur ou une directrice de l’innovation. En revanche ce qu’on veut, nous, c’est notre travail, c’est faire en sorte que ceux qui veulent innover puissent le faire en toute protection juridique, deuxièmement avec des fonds financiers qui viennent les aider, troisièmement en les mettant en relation avec des collègues qui pourraient les aider et qu’ils ne connaissent pas. Parce qu’un groupe de 66 000 salariés vous ne pouvez pas connaitre tout le monde. Et des fois vous êtes en train de travailler sur une innovation qui a déjà été créée par un collègue à 500 kilomètres ou votre collègue en Espagne ou votre collègue au Bénélux et vous ne le savez pas. Et donc notre travail il est aussi dans la meilleure diffusion des innovations existantes et de rapprocher des gens. Notre travail c’est de casser les habitudes, casser les silos, casser les conventions. Donc c’est un travail de poil à gratter qui est passionnant et qui permet de créer de nouvelles façons de travailler en lien aussi avec la révolution du numérique qui permet ça. Parce qu’on peut faire ça parce que le numérique nous permet justement d’avoir des contacts, enfin des collègues en Pologne ou des collègues en Espagne avec qui on peut discuter et ce ne serait pas possible sans le numérique. Et donc cette diffusion, cette capitalisation et cette diffusion de l’innovation elle n’est possible que grâce au numérique. Donc on a, en résumé, un côté important, c’est faire la différence dans les offres d’Eiffage en matière de développement durable, on a un côté sur tout ce qui est aussi le reporting de la performance sociale et environnementale, ce qu’on appelle le reporting RSE, et puis toute l’innovation transverse. »

« C’est vraiment le fil commun à tous les continents, c’est recherche ville durable désespérément. Que ce soit sur les continents où il y a une urbanisation extrêmement rapide, en Afrique, en Amérique latine et dans certaines parties de l’Asie, ou que ce soit dans des territoires dont la transition urbaine est très ancienne et on est en phase ultime d’urbanisation, notamment en Europe, il n’empêche qu’on a les mêmes problèmes : réduction de l’empreinte énergétique nécessaire, congestion de trafic qui rend impossible les mobilités, pollution atmosphérique, pollution de l’eau, déchets. Donc l’idée c’est d’éviter que des villes nouvelles, notamment en Afrique ou en Amérique latine, ne fassent les mêmes bêtises que celles qu’on a faites nous en Europe. Et puis surtout qu’on puisse proposer des solutions qui ne soient pas trop chères, qui puissent partager le développement durable dont on a tellement besoin. Notamment pour vos générations si on ne veut pas que vos propres enfants étouffent. On est quand même dans une situation sur laquelle on estime qu’on a, aller, vingt ans maximum, pour changer la donne, vingt ans. Et encore je suis large, il y a des climatologues qui disent moins. Donc, il faut changer de mode constructif, il faut travailler bas carbone, il faut travailler uniquement avec les énergies renouvelables, il faut recycler tous nos déchets de chantier. Et tout ça, vous vous doutez bien que ce n’est pas uniquement un ingénieur qui peut le dire, ou un architecte qui peut le dire ou …C’est à la fois l’urbaniste qui doit l’exiger, l’architecte qui doit l’exiger, l‘ingénieur qui doit savoir le faire, les fournisseurs qui doivent s’adapter. Donc c’est tout ce qu’on appelle la chaine de la valeur de l’acte de construire. »

 

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« [Pouvez-vous présenter la branche Eiffage Aménagement dans laquelle vous travaillez ?]

Très bien. Donc Eiffage c’est une grosse entreprise avec quatre branches principales. Donc il y a quatre métiers que regroupe Eiffage. Eiffage Route, c’est les infrastructures. Eiffage Concession c’est tout ce qui est autoroute, en gros je caricature un peu. Après on a Eiffage Energie qui fait la construction de la chaleur et la gestion des systèmes d’énergie. Et il y a Eiffage Construction, c’est de cette branche-là dont on parle. C’est-à-dire qu’Eiffage Construction qui regroupe la construction, l’immobilier, l’aménagement. Donc là, je vous l’ai dit dans le mauvais ordre. Donc nous on est vraiment un constructeur en fait, Eiffage Construction. Mais en réalité l’aménagement est en amont de ces trois métiers. Donc l’aménagement urbain on essaie de trouver des fonciers qui peuvent, des collectivités ou des propriétaires privés ou des propriétaires industriels qui veulent renouveler leurs terrains et leurs emprises, peuvent chercher un aménageur. L’aménageur lui il viabilise les fonciers et les vend à des promoteurs, et le promoteur, lui il faut construire son immeuble. D’accord ? Donc tout ça c’est la chaîne …

[Donc ça fait partie des droits de bâtir ?]

C’est ça, nous on vend les droits à construire. Donc cette chaîne-là depuis l’amont, depuis la création du foncier, c’est-à-dire la viabilisation d’un terrain, donc on peut être amené à, c’est le cas sur Châtenay, à acheter un terrain, déconstruire des bâtiments, viabiliser les fonciers, c’est-à-dire mettre les tuyaux pour qu’on puisse construire dessus, faire les rues et puis après commercialiser. Enfin tout ça est en parallèle en même temps. Mais après, c’est le promoteur qui construit les immeubles, les logements qui sont vendus, c’est le promoteur qui vent les logements, nous on vend les terrains et les droits à construire au promoteur. Le promoteur vend au client et après la construction, enfin Eiffage Construction, construit. Donc nous on se trouve en amont, mais dans la branche Eiffage construction. Et en même temps, dans cette structure-là par rapport au quartier LaVallée, on a une structure sociale complémentaire parce que moi je représente la SEMOP. Donc qu’une SEM d’opération, qui est une structure spécifique créée pour gérer le quartier et qui a comme actionnaire la ville de Châtenay, Eiffage Aménagement et la Caisse des dépôts. Donc je suis salariée d’Eiffage Aménagement mais mise à disposition de cette société qui s’appelle la SEMOP.

[Société d’opération unique ?]

Société d’Economie Mixte à Opération unique. Donc économie mixte pourquoi ? C’est parce que dans l’actionnariat il y a une collectivité ou un acteur public. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

« [Pour revenir un peu plus sur votre mission à vous, Eiffage vous a présenté comme l’assistant à la maîtrise d’ouvrage, en quoi ça consiste réellement l’assistance à la maîtrise d’ouvrage ?]

C’est un rôle de conseil et d’accompagnement, enfin d’appui au maître d’ouvrage. Donc, c’est-à-dire qu’on est identifiés sur un certain nombre d’objectifs comme étant des soutiens à la SEMOP, notamment pour l’obtention des certifications, labellisations. On est là pour les aider à produire, à identifier les enjeux stratégiques, à mettre en place la stratégie de développement durable. On est aussi là pour les aider dans le suivi, évaluation des projets sur les lots et les espaces publics pour savoir s’ils sont bien cohérents avec la stratégie qu’on a mise en place et qu’on a traduite dans différents documents. Donc, on aide la SEMOP à lire, à vérifier les permis de construire, à vérifier les dossiers de consultation des entreprises-travaux. On est un appui pour eux pour avoir une évaluation de suivi en continu de leur projet et s’assurer qu’ils obtiennent bien les labellisations qu’ils ont l’intention d’obtenir.

[Et dans, dans le même ordre d’idée, l’agence Base vous a défini comme les « écologues » du projet. Vous êtes d’accord avec ça ?]

 Pas uniquement. On n’est pas que les écologues parce que le profil écologue est un aspect du développement durable qui n’est pas le seul dans notre mission. On a effectivement des écologues qui travaillent sur le projet, et c’est vrai que c’est plutôt par ce prisme-là que Base nous connaît puisqu’eux ils sont sur le volet paysage, et donc on a notamment des échanges sur la valorisation écologique des espaces publics et des cœurs d’îlots, avec notamment tout ce qui est création d’habitats qui sont fonctionnels pour la faune et la flore, etc. Mais on ne travaille pas que sur ça. Alors après c’est le prisme de Base qui fait qu’ils voient beaucoup ça, mais on est aussi des spécialistes en énergie, en gestion des eaux pluviales. D’ailleurs, Even Conseil n’est pas seul sur la prestation d’A.M.O. développement durable, on est un groupement avec deux autres entreprises : il y a Suez Consulting et Atelier LD. Donc Suez, eux pour le coup, sont plutôt sur des expertises matériaux et énergies. Et Atelier LD sur le volet hydraulique, gestion des eaux pluviales. Et puis Even, effectivement, volet biodiversité, mais il y avait aussi tout le volet santé, mobilités douces, etc. et puis suivi du chantier aussi.

[[…] C’est une nouvelle expertise que vous apportez dans l’aménagement urbain ?]

Oui, l’A.M.O. développement durable n’est pas toujours présent sur tous les projets. On va dire qu’il y a un AMO développement durable souvent quand il y a une vraie stratégie de développement durable qui est souhaitée par le maître d’ouvrage et du coup, on va avoir vraiment une entité qui va prendre en charge la création, la mise en place de cette stratégie et parfois aussi on a des projets où la dimension développement durable est prise en charge en partie par l’urbaniste et par le paysagiste parce qu’on a des paysagistes qui sont très sensibles aux problématiques écologiques, aux problématiques de gestion des eaux pluviales, puis on a des urbanistes qui sont très sensibles aux problématiques des matériaux, des énergies. On va dire qu’on n’est pas obligés de fonctionner toujours comme ça, mais l’A.M.O. développement durable quand même regroupe des experts qui sont spécialisés sur ces sujets-là, et c’est quand même pratique. C’est pratique pour définir une stratégie qui soit cohérente et qui traite bien de tous les sujets. Donc, on s’assure qu’on a une vraie démarche cohérente sur ce qu’ont prévu l’urbaniste et le paysagiste. Ce n’est absolument pas incompatible. D’ailleurs la plus part du temps, ils sont sensibilisés à ces problématiques-là. Mais on peut essayer d’aller un peu plus loin en travaillant avec eux et la maîtrise d’ouvrage. »

« [Et quelle appréhension de la ville vous avez, de la ville et de ses espaces ? Quel type d’urbain vous fabriquez ?]

Alors on est pas vraiment des fabricants parce que on n’est pas concepteurs. C’est-à-dire que contrairement à Base et François Leclercq, nous on ne dessine pas. En fait, on n’est pas concepteurs, on n’est pas maîtres d’œuvre. Après par contre, ce qu’on va faire c’est accompagner le maître d’ouvrage, que ce soit une ville, ou un promoteur, ou un aménageur, on va essayer d’identifier les enjeux environnementaux qui sont vraiment les plus importants. On ne va pas essayer d’être parfaits sur tous les sujets, parce que c’est pas forcément intéressant. Il vaut mieux en faire beaucoup sur les sujets qui sont vraiment importants. Donc on va les aider à identifier ces sujets-là. Et puis après on va essayer de les accompagner en leur apportant des retours d’expériences, en travaillant sur des choses qu’on connaît, des sujets qu’on connaît, ce qui se fait ailleurs. Et du coup, le but ça va être d’essayer d’arriver à on va dire une ville du coup qui est à la fois confortable pour les humains, d’un point de vue santé, c’est-à-dire confort pour les modes doux, calme, enfin minimisation [coupure] on va dire la présence d’espaces d’agrément, et à la fois pour aussi que ce soit des espaces fonctionnels pour la biodiversité, donc là, je cite la biodiversité, on va dire la fonctionnalisation écologique, la santé, la lutte contre le changement climatique. Donc la lutte contre le changement climatique, on va essayer de travailler sur une ville qui émet moins de carbone, et qui consomme moins de ressources. Avec une ville qui est plus sobre dans ses usages, qui consomme moins d’eau, moins d’électricité, qui va sur des matériaux qui sont réemployés, ou biosourcés, ou recyclés, et qui mobilise un approvisionnement en ressources qui peut être en partie renouvelable autant que possible, et puis qui tient compte de l’existant, comme on disait tout à l’heure sur les arbres notamment, mais aussi les sols, la pleine terre. C’est ça les grands principes de ce qu’on va rechercher. »

 

 

IV-  L’innovation au cœur du projet LaVallée

A-   L’innovation : définition et enjeux

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« [Quelle est votre définition de l’innovation générale et selon Eiffage ?]

Alors déjà l’innovation par rapport à un projet d’aménagement, l’innovation en soi est-ce que c’est simplement de la nouveauté ? Il faut aujourd’hui que cette innovation elle ait un intérêt. Et l’intérêt il est porté par les problématiques globales d’une ville. Aujourd’hui c’est la question pour beaucoup d’écologie. Donc quand l’innovation aujourd’hui fait qu’on doit développer des projets alors nécessaires au développement urbain, on doit créer de l’emplois, on doit créer des équipements, on doit créer tout ce qu’il y a autour d’un logement pour que le logement soit viable. Donc pour qu’un logement soit intéressant, il faut pouvoir, finalement on ne fait pas que vivre, il faut aussi qu’on puisse aller à l’école, aller au travail, manger, se déplacer, se divertir. Et donc c’est un petit peu tout ça qui doit être mis en avant. Et aujourd’hui l’innovation fait que cette offre à la fois d’équipements, d’infrastructures et de bâtiments, elle doit tenir compte de l’économie de la ressource, en fait on ne peut plus construire les villes comme avant, l’optimisation de l’énergie, et puis de l’accessibilité pour tous.  Parce que si je fais court, faire la ville durable pour les riches ça n’a pas beaucoup d’intérêt parce qu’il n’y a pas beaucoup de riches. L’intérêt c’est plutôt de faire la ville durable pour tous et donc il y a à la fois un aspect qui est très technique, sur aujourd’hui apporter de nouveaux critères, des critères qui sont à la fois des critères de durabilité, la consommation d’énergie pour construire tel ou tel équipement ou tel ou tel bâtiment, et la consommation pour que le bâtiment puisse vivre, voire la qualité des ressources, notamment la qualité de l’énergie. Plus l’énergie va être durable, locale, plus ça va être intéressant. Si c’est uniquement l’électricité, gaz et électricité classiques, on sait bien qu’il va se passer des choses compliquées en termes de coût de l’énergie dans les prochaines années. D’où, travailler sur la transition énergétique.  Donc il a tous ces éléments-là qui sont liés à la technique du bâtiment. Et puis il y a tous les éléments aussi qui sont liés à la sociologie de ces bâtiments, parce qu’il faut que les bâtiments soient accessibles d’un point de vue financier. Donc il faut entrer dans un modèle économique et l’innovation peut être un peu aussi dans un modèle économique. Et puis aussi faut que l’innovations aille dans le côté réversible, parce qu’en vrai on construit bien sûr des bâtiments et des quartiers, des bouts de ville pour on espère 50 ans, 100 ans voire des fois on s’imagine ça sera pour l’éternité. Bon peut être que le Louvre c’est peut-être pour l’éternité, on a des grands bâtiments, j’entendais parler par exemple du musée Sainte-Sophie qui là va redevenir une mosquée. C’est des bâtiments qui ont traversé les régions, qui ont traversé les époques. On ne compte pas là-dessus, au contraire nous on a un nouveau modèle, quasiment mental, où on doit préfigurer la réversibilité. Mon bâtiment, mon équipement faut que je puisse me dire « Bah peut-être que dans 5 ans je vais le démonter. » Et donc pour le démonter c’est bien de savoir comme il a été construit, comment je peux le réhabiliter. Et ça c’est une construction mentale un petit peu différente, puis c’est aussi parce qu’il faut tenir compte des évolutions des modes de vie. Il y a 15 ans, par exemple, il n’y avait pas tous ces Iphones, ces Ipad, donc aujourd’hui on se rend compte qu’il n’y a jamais assez de prises, voire même dans les cuisines. Il y avait 2 prises dans les années 50 alors qu’aujourd’hui avec 5 prises il n’y a pas assez pour le four, le four micro-ondes, le grille-pain, la Nespresso, etcetera.

[Les besoins se différent.]

Voilà, donc j’imagine que dans 15 ans peut-être qu’il n’y aura plus qu’un seul équipement et on aura peut-être besoin que d’une prise. Enfin, on ne sait pas trop. Donc il faut essayer de se dire que c’est aussi normal. Alors après on peut aussi parler de la façon dont on vit. Il y a 50 ans on vivait en famille, aujourd’hui les familles sont recomposées, il y a plus de célibataires. Peut-être que dans 20 ans on revivra en communauté, je dis n’importe quoi mais il faut se dire que peut-être qu’il faut imaginer que les logements vont être plus petits, plus grands. Donc, il faut permettre de pouvoir rajouter des prises, rajouter des portes. Donc on est dans une réversibilité là-dessus. Donc l’innovation elle est beaucoup écologique, elle est beaucoup économique et elle est beaucoup sociologique. Ce qui fait qu’aujourd’hui la façon dont on approche l’innovation dans nos projets, et dans le projet de Châtenay-Malabry en premier, on se dit chaque fois qu’on veut développer quelque chose : « est-ce que ça m’apporte du carbone, si je fais court, est-ce que c’est d’un point de vue carbone, ressource, bilan carbone, c’est mieux, moins bien, différent ? Est-ce qu’économiquement c’est plus cher, c’est moins cher, des gens pourront l’acheter ou veulent l’acheter ou est-ce que l’économie elle est vraiment importante, intéressante ? Et après en termes de cadre de vie, est ce que ça apporte une qualité différente, voire même en termes de résilience, est-ce que ça veut dire que demain si j’ai plus 2 degrés, plus 3 degrés, plus de pluie, moins de pluie, plus souvent des phénomènes naturels compliqués, est-ce que le bâtiment on vivra bien de dedans ? »

[Est-ce qu’il va résister ?]

Voilà c’est ça. Donc il y a un peu, c’est 3 grands piliers de, pour moi, de l’innovation. Le carbone, on va dire, le coût global et qualité de vie et résilience. »

 

« [Quels sont les enjeux de ce projet en matière d’aménagement durable ?]

Alors les enjeux du projet, comme je vous disais, c’était de répandre ces quatre axes donc bas carbone, économie circulaire, nature en ville et nouveaux services, d’avoir tout un panel de solutions pour montrer aujourd’hui qu’on avance sur le sujet. Et puis travailler sur ce qu’on a appelé des totems technologiques. On s’est dit « Il faut qu’on aille plus, plus loin en bois, donc il nous faut un bâtiment tout en bois pour montrer que la ville est différente. Faut peut-être un bâtiment de terre. On montre bien qu’on a un bâtiment en terre pour qu’on puisse dire qu’il n’y a pas le béton parmi les matériaux. » Le béton est un matériau formidable pour les fondations, pour les structures, pour les porte-à-faux, pour les équipements mais après on peut aussi le mixer avec du bois, de la terre, de la brique, etcetera. Donc on a des totems qu’on veut sur le bois, sur la terre. On veut des totems en termes d’économie circulaire. Alors on a réussi faire 100% des matériaux recyclés sur place, on voudrait aussi, peut-être, travailler sur le réemploi. Tous les matériaux, tous les objets qu’on a réutilisés, comment on pourrait les réintroduire dedans ? Ça c’est un totem parce qu’aujourd’hui il faut travailler avec les assureurs. Dans un logement neuf si on met un luminaire qui n’est pas neuf, l’assureur nous dit « Moi quelles garanties j’ai ? ». Donc il faut presque retravailler sur une filière d’assurances, assurance qualité/remploi. Et ça c’est l’avenir parce que si on peut faire ça, on jette tellement de choses, il y a plein de choses qu’on peut réutiliser.

[Il faut réfléchir à tout.]

Voilà. Ça c’est un petit totem organisationnel, on va dire. Sur la nature en ville on voudrait travailler sur les biodéchets. Si sur 2 200 logements, 2 200 cuisines, ça fait quoi come volume de biodéchets ? En fait on se dit finalement on pourrait faire du gaz. Il faut juste que les gens aient l’habitude de descendre leurs biodéchets tous les jours, que quelqu’un les récupère, les mette dans un méthaniseur. On peut faire du gaz gratuit. Donc je fais cuire mes légumes avec du gaz, les épluchures de ces légumes vont au méthaniseur qui recrée du gaz pour cuire mes prochains légumes. On est vraiment économie circulaire. Et là, donc ça c’est un totem qu’est à la fois économie circulaire et voire aussi qui est un totem important parce que si on sépare les biodéchets des poubelles on a un volume, on baisse de 30 % le volume. Donc même à l’échelle de la ville, on peut avoir des camions plus petits, etc. Enfin, c’est aussi tout un impact un peu important. Donc ça c’est un totem sur les… »

[Ce sera tous les modes de vie, ça va quand même toucher le … ]

Là ça va toucher tout le monde, les cuisines, les cantines, les restaurants. Après, est-ce que les gens vont se discipliner ? Si en même temps ils ont, d’où l’intérêt, si c’est un méthaniseur qui fournit leur gaz et si les gens y voient une économie parce que c’est eux qui ont produit la ressource pour faire le gaz, ça peut devenir un cercle en coût global intéressant. Et sur les nouveaux usages on veut travailler aujourd’hui sur le quartier qu’on appelle le « quartier service ». Comment aujourd’hui on pourrait travailler sur une application qui permettrait, alors bien sûr de suivre son logement, de suivre plein de choses, de suivre la consommation de son logement en eau, en électricité et tout, mais aussi de travailler sur le quartier du temps de partage, des ateliers communs. Ce serait comment on travaillerait sur du lien social par rapport à la ville. C’est aujourd’hui les conciergeries, les nouvelles conciergeries, c’est l’optimisation du quartier. »

 

« [Qu’est ce qui est utilisé pour l’écoquartier pour bâtir, des techniques et matériaux de construction ?]

En matière technique, ce qui n’est pas aujourd’hui hyper innovant c’est le réseau de chaleur, mais c’est extrêmement vertueux parce que ça apporte beaucoup d’énergie renouvelable. C’est extrêmement intéressant. Après si ce réseau de chaleur je le connecte avec un méthaniseur et que je mets la géothermie, puis du gaz, et puis dans le gaz du biogaz là ça devient innovant. Donc en termes de techniques, c’est des techniques qu’aujourd’hui on essaie de travailler sur le mixte. On est forcément obligés de travailler sur différents matériaux, le béton recyclé, le bois, le biosourcé, la terre. Aujourd’hui est-ce qu’on a les filières, est-ce que ça rentre dans le coût, est-ce que les gens en veulent parce qu’un bâtiment en terre les gens disent « Ah mais c’est dangereux ». Il y a une question un peu de culture. Donc aujourd’hui, on a toutes les idées, toutes les solutions, l’envie de faire et il faut que ça rentre dans les trois cases. Parce que des fois par exemple en matériaux biosourcés, il existe de superbes peintures aux algues mais elles coûtent hyper cher et en même temps on me dit « Elles coûtent super cher et ça apporte quoi en termes de … » Et là, la part carbone est finalement très limitée sur un bâtiment. Alors que l’isolation là par contre c’est un gros poids. Donc des fois, stratégiquement on se dit il faut mieux qu’on prenne quelque chose qui a un gros poids plutôt que quelque chose qui est un peu anecdotique. Une fois qu’on aura fait l’isolation, les parquets comme ça et tout, on pourra mettre de la peinture, mais d’abord qu’on commence par des choses vraiment…

[De base.]

Vraiment, voilà exactement, de base. Et donc en plus si je mets la peinture les entreprises en construction elles vont dire « Mais très bien mettez votre peinture il n’y a pas de soucis. ». Alors que si je leur dis que je veux changer l’isolant, je change les pratiques et là ils me disent « Mais pourquoi vous voulez changer ? ». Et là on commence à avoir un débat, une négociation, on change les pratiques, on change le mode de faire. Et ça c’est plus intéressant. Donc des fois c’est mieux de prendre des choses plus compliquées à mettre en œuvre mais qui vont bousculer un petit peu la façon de faire la ville. Donc ça en fait c’est le passage à l’acte. Mais c’est passionnant. Des fois on dit « Ah, on n’y arrive pas c’est difficile. ». Oui mais on aurait pu ne pas le faire du tout. On aurait pu, donc c’est important de passer par ces moments de réalité et de développement. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« [D’après vous quelle est l’importance de l’innovation pour construire une ville durable ?]

En toute objectivité ?

[Oui.]

Elle est essentielle. Non, disons que ce à quoi il faut faire attention c’est de dire « ok on veut être ambitieux, mettre des choses en développement durable qui sont vraiment fortes, des innovations », mais il faut faire attention à ce que les bases aussi soient respectées. Les bases du métier. Respecter les lois sur l’eau, respecter les ICPE, respecter les autorisations environnementales, respecter le fait qu’il faut faire des états des lieux, une étude d’impact, que ton étude d’impact elle soit bien travaillée, que tu ne balayes pas d’un revers de main s’il y a une espèce protégée sur ton site, il faut que tu prennes ça en compte dans tes travaux. Donc ça c’est vraiment important d’avoir cette base qu’il faut toujours, toujours, toujours renforcer parce qu’en vrai on fait toujours des erreurs sur cette base-là, pour après promouvoir tes innovations et ton ambition. Si tu promeus ton innovation mais que derrière tu as fait tes travaux salement de manière dégueulasse, je veux dire tu as aucun crédit à ça. Donc l’innovation elle a une part très très forte et très intéressante dans les écoquartiers, puisque les écoquartiers c’est une myriade d’acteurs en fait. Et c’est une myriade d’acteurs que tu dois coordonner et l’ambition d’un quartier c’est qu’il soit vivant, donc c’est un enjeu un peu impalpable. Et tu te dis que l’innovation va permettre aussi ça. Mais l’innovation ça ne veut pas dire de la technologie. Ce que je vous disais sur RéaVie, c’est une innovation qui n’est pas du tout technologique, c’est juste de l’organisation, de la maîtrise, de la maîtrise des hommes, de la maîtrise des acteurs. Parfois, le lien social ne s’inscrit pas forcément avec des outils, c’est la manière dont tu les utilises. Donc, ta question c’était quelle est la place de l’innovation pour faire une ville durable ?

[Ouais.]

Je pense qu’elle est importante parce qu’il faut toujours aller au-delà de ce qu’on imagine faire, il faut juste qu’elle soit bien réfléchie. Pas faire de l’innovation pour se faire plaisir. Qu’elle soit dans une histoire, dans un génie du lieu, dans une ambition d’une offre, il faut qu’il y ait une histoire dans ton offre, il ne faut pas que ce soit une liste à la Prévert des innovations qui n’ont pas de sens. »

 

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« Il y a aujourd’hui [sur le terrain de l’écoquartier] des tas de gravats et en fait c’est les 27 immeubles qu’étaient les bâtiments universitaires et les résidences de logements étudiants qu’ont été déconstruits de façon fine. On a enlevé, enfin il y a des bénévoles qui sont venus enlever les pognées de partes, les rideaux, enlever les prises pour pouvoir les réutiliser, enfin les reconditionner et les réutiliser. Ça c’est pour la partie second œuvre. Et puis pour la partie béton on a tout déconstruit, concassé sur place pour éviter les rotations de camions. C’est-à-dire pour sortir les terres on a évité beaucoup de rotations de camions. On a emmené les machines ici, on a tout déconstruit sur le site. Et tout ce qui est sur site sera réutilisé soit sous les voiries, soit pour construire les bâtiments. Et c’est ça la nouveauté. C’est-à-dire, sous les voiries ça, ça se fait depuis un long moment. Mais ce qui est nouveau, c’est de réutiliser des bétons recyclés, donc qui ont déjà fait l’objet d’une construction, dans les nouveaux immeubles. Dans tous les nouveaux immeubles. Et ça, c’est une grosse innovation, c’est de l’économie circulaire qu’on a mise en place sur cette opération. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

« [Et pour vous il est exemplaire ce quartier ?]

Moi je pense que dans la démarche, dans la recherche, il y a une vraie recherche d’innovation. Après, dire qu’il est exemplaire dès aujourd’hui je trouve que c’est un peu prématuré parce qu’on pourra dire qu’il est exemplaire quand il sera livré et qu’on verra que oui on a atteint les objectifs et que ça fonctionne et que c’est ça qui était recherché. Je pense que là, on est trop prématurés, mais en tout cas il y a une vraie recherche. »

[Et quels seraient les critères de cette exemplarité selon vous ?]

[…]

Je pense pour le coup que les plus gros efforts qui ont été faits c’est travailler sur le volet matériaux, je pense, notamment le chantier, à mon sens, le chantier est très évolué par rapport à d’autres façons de faire sur d’autres chantiers. Le fait qu’on ait complètement concassé tous les bétons, recyclé tous les bétons, c’est quelque chose qui est encore aujourd’hui extrêmement rare et notamment pour la formulation de nouveaux bétons, et qui sont vraiment limites de ce qu’on peut faire au maximum de la recarbonatation. Après là aussi, pour les phases suivantes, on verra, mais j’espère qu’on sera exemplaires sur les matériaux biosourcés, ce n’est pas encore le cas sur la phase une, mais c’est l’objectif sur les phases deux et trois. Après sur le volet biodiversité aussi j’espère qu’il y a un certain nombre de…, tous les lots jouent le jeu, il y a des lots qui vont encore plus loin, les espaces publics devraient aller assez loin. Il y a des choses qui sont intéressantes, donc j’espère que ça va se concrétiser aussi dans le bon sens, parce qu’il y a une vraie recherche notamment de travail sur les espèces protégées, etc., et de création d’habitats diversifiés, même si c’est aujourd’hui quelque chose qu’on peut retrouver plus facilement sur d’autres projets, mais qui a été pas mal creusée, notamment en termes de communication, de sensibilisation des futurs habitants, etc., par la labellisation « biodivercity ». On est un projet pilote sur la labellisation « biodivercity ready », c’est-à-dire à l’échelle d’un quartier, alors qu’avant la labellisation est vraiment sur les bâtiments uniquement. Donc ça c’est un truc nouveau qu’on expérimente sur le projet. Et après je pense qu’ils ont aussi quand même, sur l’approvisionnement énergétique, le fait que l’on soit sur de la géothermie à quasiment soixante pourcents il me semble, je crois que c’est cinquante-six, c’est aussi quelque chose qui est quand même à mettre en avant, même si ça existe ailleurs aussi, ce n’est pas anecdotique non plus. »

 

 

« [En quoi vivre dans l’écoquartier LaVallée ça serait la vie à la ville idéale ?]

Idéale ? Ça dépend, chacun a sa perception de l’idéal. C’est très difficile. Non mais les avantages qu’il y a clairement sur le quartier LaVallée, comme je disais tout à l’heure, c’est qu’on est à proximité directe du tramway. On va avoir plusieurs lignes de bus qui traversent le site. Donc les gens ont un accès aux transports en commun à pieds de partout, en tout point du quartier. Donc ça c’est important. Et après, effectivement, on aura une animation de quartier en théorie, avec la programmation qui est prévue, puisqu’on va retrouver, pour les habitants, il y aura du petit commerce en rez-de-chaussée, on aura la ferme urbaine sur laquelle il va y avoir des animations, ça peut être des cueillettes, des ateliers, etc. Donc, c’est aussi quelque chose qui va faire vivre le quartier. Il y a un équipement, un peu tiers-lieu, qui est prévu avec des ateliers, etc. dans l’ancien gymnase, qui peut du coup aussi être intéressant pour la vie de quartier. Et après il y a les écoles à proximité. Donc il y a beaucoup de services et d’aménités urbaines qui sont accessibles facilement. Après, est-ce que c’est l’idéal de tout le monde ? C’est difficile à dire. Mais tout ça c’est des atouts qui sont non négligeables. Et puis, il y a le Parc de Sceaux qui est juste en face, qu’il ne faut pas oublier, qui est un espace vert d’agrément, qui est très rare, et qui est un des parcs structurants de l’Île-de-France. Donc, c’est quand même bien d’avoir ça la porte à côté, complètement. »

 

« [Quel est l’intérêt du label pour l’écoquartier ?]

 L’intérêt d’être labellisé, j’ai déjà un peu commencé à l’évoquer tout à l’heure, ça nous permet un peu de faire un bilan de la démarche de développement durable qui a été menée sur le projet. Ce n’est pas au moment où on se met à travailler sur la réalisation, qu’on se dit : « bon, alors qu’est-ce qu’on fait ? ». C’est vraiment quelque chose, enfin une dynamique qui est engagée dès le début de la conception et qui est approfondie au fur et à mesure. Mais au moment où on commence à préparer les pièces pour la labellisation « écoquartier », c’est sûr qu’on doit faire un bilan des engagements qui sont déjà actés, des choses qu’il faut renforcer, des choses qui sont déjà bien engagées. Et puis, après, c’est aussi, comme je vous le disais, un label qui est connu nationalement, et puis qui est délivré par l’Etat, et puis du coup qui est obtenu par la collectivité. Donc, l’intérêt c’est aussi de montrer que la collectivité est engagée dans cette démarche-là, qu’elle la porte, et puis que le projet a été reconnu par l’Etat comme étant digne d’un écoquartier. »

« [Vous pensez quoi des incohérences qu’il peut y avoir par rapport au therme « écoquartier », notamment comme outil de marketing territorial, du fait que « éco » serait plus « économique », qu’« écologique » ?]

Je ne le pense pas. En tout cas, il n’y a rien dans la charte des écoquartiers qui amènerait à penser que l’on est plutôt sur un label économique, enfin d’optimisation financière de projet. Pas du tout. On va dire qu’obtenir le label « écoquartier » peut avoir un avantage pour le maître d’ouvrage, enfin pour l’aménageur ou pour les promoteurs qui construisent les lots, parce que c’est une étiquette et que ça démontre la démarche qui a été portée. Après honnêtement aujourd’hui, est-ce que les gens achètent parce qu’on est dans un écoquartier et que c’est plus rentable d’être écoquartier que de ne pas l’être ? Je pense qu’on n’est pas encore là aujourd’hui. Peut-être qu’un jour ce sera le cas. Mais je pense que les gens, dans leurs critères d’achats, ont de plus en plus le souci la dimension environnementale, mais que ce n’est pas leur critère prioritaire. Et le fait de savoir que leur quartier est labellisé « écoquartier », ils vont peut-être être effectivement contents et puis être intéressés par, du coup, le volet environnemental et avoir cette curiosité. Mais je pense que ce n’est pas leur critère de choix prioritaire, enfin en tout cas pas aujourd’hui. Après, honnêtement, j’ai pas du tout échangé avec les acquéreurs, donc je ne sais pas. Mais, j’imagine que ce n’est pas une démarche qui s’inscrit vraiment dans un intérêt purement économique, parce qu’aujourd’hui les retombées commerciales en termes de vente de logement, je pense, ne sont pas forcément énormes. Donc effectivement, après ça peut avoir un intérêt pour démontrer que le groupe Eiffage ou je ne sais quel autre groupe qui est amené à travailler sur des écoquartiers, a cette démarche environnementale et sait travailler sur de l’écoquartier, et puis ça peut rassurer d’autres collectivités qui veulent faire de l’écoquartier. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« C’est le projet pilote du nouveau label biodivercity. Donc ça c’est aussi quelque chose qu’on n’avait pas prévu à Châtenay. Sauf qu’avant 2017, avant qu’on gagne Châtenay, il existait le label biodivercity pour les bâtiments, pas pour les écoquartiers. Là on a mis écoquartier Smartseille mais ce n’est pas lui, c’est un bâtiment qui est labellisé. Donc voilà, c’est le projet pilote du nouveau label biodivercity ready dédié aux projets d’aménagements. Ça veut dire qu’on a proposé en 2019 à la mairie, on leur a dit « écoutez, biodivercity c’est un label qui est porté par le Conseil international de biodiversité de l’immobilier, c’est un label qui atteste qu’en phase construction et en phase exploitation votre écoquartier, ou votre bâtiment quand il s’agit seulement d’un bâtiment, n’est pas néfaste pour la biodiversité. » D’accord ? Donc depuis l’intégration de matériaux biosourcés en passant par des terrasses végétalisées avec des prairies mellifères, en passant par un respect de l’entomofaune et de l’avifaune, etcetera. Bref, donc on leur a dit « bah écoutez nous on est plutôt bon sur le label biodivercity bâtiment, on voudrait se faire les dents sur le tout nouveau label biodivercity écoquartier qui sort, on vous propose d’être projet pilote. » Banco, le patron, enfin le maire a dit oui et puis Châtenay va être projet pilote pour ce label, voyez ? Donc ça pareil, aussi du point de vue de la reconnaissance comme c’est un démonstrateur nous on est poussés à proposer à cet écoquartier-là des nouvelles innovations parce qu’on sait qu’on a un accès privilégié, quelque part, si vous voulez, au maire qui va mieux comprendre ce qu’on veut faire. Lui il est content parce que c’est chez lui que ça se passe, c’est tout bon pour sa commune, puis nous on est content parce qu’on sait qu’il va nous laisser travailler sur ce label biodivercity ready. Donc ça je ne l’avais pas proposé en 2017, je ne l’ai proposé qu’en 2019. »

 

B-    Nouvelles pratiques constructives et nouveaux outils

[ Voir Fig. 1 ]

a-     L’innovation transverse

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« Il y a un organisme qui dépend d’Eiffage qui est extrêmement important à mettre en avant dans le cadre du projet, c’est la direction développement durable et innovation transverse. Alors ça je pense que c’est une spécificité du groupe Eiffage, c’est qu’aujourd’hui toute personne qui travaille dans la construction, dans l’architecture, dans l’aménagement, dans l’urbanisme forcément aujourd’hui on doit être durable, parce que les règlementations changent, parce que les modes de vie changent, parce que les inquiétudes changent. Donc forcément tout le monde essaie de tenir un peu écologique, un peu vert, de changer un petit peu ses pratiques. Donc chaque métier va changer, mais Eiffage a choisi à la fois de faire évoluer chacun de ses métiers, la route va changer, le bâtiment va changer, l’aménagement va changer, l’énergie va changer. Mais ils ont décidé, au lieu d’avoir, bon moi je suis directeur innovation dans le cas d’Eiffage Aménagement, je pourrais être tout seul. Il y a un directeur innovation dans la construction, il y a des directeurs innovation à la route. Mais ils ont mis en plus aussi une direction transversale, donc à l’échelle du groupe, de la holding et qui fait le lien entre tout le monde.

[Pour mieux communiquer.]

Donc moi je travaille tous les jours avec la direction développement durable et innovation transverse, qu’on appelle entre nous le DDDIT, et moi en fait je leur pose des questions : « Je cherche quelqu’un qui pourrait me faire de la fertilisation des sols. Je cherche quelqu’un qui pourrait me faire un vote par internet sur le nom des rues. Je cherche quelqu’un qui me récupérer tous les biodéchets des cuisines. Je cherche quelqu’un qui pourrait me faire une conciergerie à la fois des services mais en même temps aussi du lien social. Je cherche une entreprise qui puisse me faire des revêtements de sol très clairs, parce que s’ils sont clairs ils ne vont pas capter la chaleur donc c’est important d’avoir ça ou voire des revêtements qui à la fois permettent de faire passer des poussettes, des landaus, des fauteuils roulants, mais en même temps qui drainent l’eau. ». Et donc là, eux, la direction développement durable et innovation transverse me dit : « Ah, et bien tu sais ton collègue de la route il a développé un revêtement particulier. Ah, tu sais que ton collègue de l’énergie, ils ont développé un agrégateur numérique. Ou alors, ah, on a une startup, on connait une startup qui travaille sur les biodéchets. Ah, on a travaillé avec tel paysagiste sur tel projet qui nous a travaillé sur la collecte des biodéchets. ». Donc eux ils sont toujours en veille permanente et ils m’accompagnent pour trouver des solutions et c’est avec eux qu’on travaille, c’est avec eux qu’on essaie de voir cette analyse du projet au regard de ces trois critères qui sont le carbone, qui sont la qualité de vie et la résilience et le coût global. »

 

b-     Maison du projet

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« Et puis après surtout le gros événement c’est que le 27 novembre dernier, on a ouvert la maison du projet. Donc on a préservé un bâtiment du site, c’était l’ancienne maison du directeur pour en faire la maison du projet, qui préfigure le quartier. Donc, on a mis un toboggan qui sera peut-être dans l’espace public, on a mis une noue paysagère qui va filtrer les eaux dans le quartier, et à l’intérieur il y a une grande maquette, plein de schémas, des vidéos qui expliquent le quartier et des gens qui sont là pour accueillir les riverains et ceux qui sont intéressés pour y vivre, pour expliquer ce qu’est le quartier, ce qu’on a comme ambition. Donc ça, ça a permis vraiment de parler du projet en lui-même. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« Alors la maison du projet ça devrait vraiment vous intéresser. Parce qu’en fait l’ancienne maison du directeur de l’Ecole Centrale on ne l’a pas détruite, on l’a rénovée vite fait et le vendredi, le samedi et le dimanche le public peut venir pour s’enquérir du projet, avoir des informations, il y a des animateurs qui sont là pour expliquer ce qu’on veut faire, quelles sont les innovations qu’on veut développer. Et en fait ça marche super bien parce qu’on a 200 personnes par week-end. Et ça c’est vraiment intéressant parce qu’on se rend compte que les gens ont plein de questions et ce qu’il faut que vous reteniez c’est que les questions qu’ils posent ce n’est pas les questions auxquelles on a pensé nous. Donc ça c’est la première leçon : c’est un différentiel entre les préoccupations des gens et ce que nous on estimait intéressant. C’est-à-dire on leur parle de trucs « ouais ça c’est vachement bien, mais ça ce n’est pas ce qui m’intéresse », et hop ils reviennent. Je vais vous montrer ça. Donc la maison du projet elle est là [montre un document].

[Elle est plus impliquée dans le projet.]

Oui, oui, oui. Et, donc c’est une équipe de quatre animateurs. Donc si vous y allez un vendredi après-midi, samedi ou dimanche, et voyez c’est seulement trois après-midis par semaines et il y a 200 personnes. C’est super beau à l’intérieur et on a surtout des photos de Châtenay-Malabry avant. Donc, ce qui est intéressant sur le projet, je vais revenir après sur ce qu’on y fait, mais sachez quand même, et ça je pense que dans le cadre de votre master c’est assez passionnant, c’est qu’on a essayé de recenser les sujets par ordre d’apparition, les questions que posent les gens. Et ça c’est ce qui nous semblait très intéressant. D’ailleurs, voyez vous-même qui êtes des sachants vous avez commencé par me parler de la SEMOP, sauf que les gens ils s’en foutent de la SEMOP, ça ne les intéresse pas. Les gens qui visitent le premier truc qui les intéresse c’est la ferme urbaine. La ferme urbaine. Nous on considère que c’est presque, excusez-moi l’expression, mais « tarte à la crème ». C’est une ferme urbaine, la biodiversité, les jardins partagés, ouais ok d’accord ça fait des années qu’on fait ça. Les gens, ils veulent savoir quand est-ce que ça sera ouvert, est-ce qu’ils peuvent avoir un logement avec vue sur la ferme, est-ce qu’ils pourront y amener les enfants le mercredi après-midi, voilà les questions premières. Deuxième question sur les éco-mobilités, est-ce qu’ils auront du stationnement, est ce qu’il y aura le bus, est-ce qu’il y aura des voitures électriques en autopartage, et atata et tatati. Et les nouveaux commerces, qu’est-ce qu’il y aura comme commerces, est-ce qu’il y aura un dentiste, est-ce qu’il y aura un EHPAD, est-ce qu’il y aura un centre de santé, etcetera. Ça c’est les trois questions les plus importantes. Et nous, sur quoi on a communiqué ? Ça, ça et ça [Probablement en montrant trois autres éléments sur la présentation]. Donc le premier truc, c’est le différentiel, le décalage entre les sujets qui, nous, nous semblaient vraiment intéressants et les sujets qui intéressent les gens. Deuxième sujet et d’ailleurs … »

 

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« [A quel point vous estimez l’efficacité d’une maison du projet dans la commercialisation et dans la vente des projets ou des commerces ?]

Pour nous c’est indispensable surtout que celle qu’on a ouverte on la veut innovante et différente des autres.

[C’était décembre passé, c’était décembre 2018 ?]

Ouais, en fait là en décembre elle a ouvert un petit peu, animée par des étudiants qui accueillaient les publics et puis aujourd’hui on cherche à en faire un lieu de destination aussi pour préfigurer le quartier. C’est-à-dire, si vous allez sur place vous verrez qu’autour de la maison du projet il y a des espaces publics qui sont faits avec des matériaux qui seront ceux du quartier, du mobilier qui sera du quartier, on a testé les mâts d’éclairage aussi pour voir si c’est ça qu’on voulait. Donc il y a une vraie préfiguration extérieure et intérieure. Et à l’intérieur, il y a une maquette qui permet de raconter l’histoire et on a aussi associé les bulles de vente des promoteurs après cette maison. Il faut traverser cette maison pour aller acheter les logements. Ça c’est nouveau et la cerise sur le gâteau c’est qu’on cherche un restaurateur, enfin un animateur de la maison et il y aura un lieu de restauration. Pour l’instant on ne l’a pas encore trouvé, mais on mise beaucoup sur cette maison du projet pour ancrer l‘image du futur quartier, que ce soit pour les habitants mais aussi pour les gens qui veulent venir acheter. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ancienne directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, le 2 mai 2019

21’01-23’56

« Donc, si vous voulez bien je vous parle de la maison du projet. Donc comme toutes les opérations d’aménagement il y a une maison du projet. C’est traditionnel. C’est un endroit où on vient pour prendre connaissance du futur quartier, il y a une maquette, il y a des panneaux, voilà. Mais par retour d’expérience j’ai souvent constaté avec déception que ces maisons du projet ce n’étaient pas des lieux très vivants. C’étaient des lieux qui étaient ouverts de temps en temps. Et puis les personnes qui sont en charges de vendre les appartements n’avaient pas toujours le réflexe d’aller dans cette maison. Il se trouve qu’en réfléchissant tous ensemble on s’est dit : « on aimerait bien en faire un lieu vivant toute la semaine et un lieu qui apporte quelque chose et qui soit aussi préfigurateur du futur quartier ». Donc, on avait la maison du directeur de l’Ecole Centrale qui était là, enfin qui était en bordure du terrain mais dans le périmètre, qui était une belle maison, pareil des années 70 avec des grandes baies vitrées, des grandes hauteurs sous plafond. Un pavillon mais un très beau pavillon, avec un beau jardin. On s’est dit : « Mais si on transformait cette maison en maison du projet. » Et c’est ce qu’on a fait. Quand on arrive dans une maison, une belle maison, c’est la maison du projet. En haut il y a marqué « La Maison ».  On l’a réaménagé d’une manière plaisante, on a mis une magnifique maquette, on a mis des films, on a mis des panneaux. Et on s’est dit « Ce lieu ce sera un point de passage obligé pour accéder aux espaces de vente des promoteurs. » Donc on va mettre l’espace de vente des promoteurs, il y a quatre promoteurs, dans le jardin. Tout en conservant une belle terrasse et des espaces verts. Et, on va donner les clefs de cet espace à une société qui fabrique toute la semaine. Et donc on a trouvé une société qui s’appelle « Surprise », qui est spécialiste de l’événementiel, qui créera des événements, créera des animations avec les associations locales mais aussi avec des particuliers, des sociétés, et qui fera un restaurant.

[D’accord.]

Donc ça, ça va ouvrir le 1er juin. Et aujourd’hui le restaurant n’est pas encore là mais on sent que ça vit et que les gens sont intéressés par le lieu. Et dans le jardin, on a mis un poulailler pour que ça fasse un clin d’œil à la ferme urbaine. On a mis des jeux pour enfants et on a fait aussi un petit jardin, un potager, qui est animé par une société qui s’appelle « mugo », qui sera peut-être le gestionnaire de la ferme et qui aussi fait des animations pour donner de l’appétence sur l’art de cultiver son jardin ou sa terrasse et son balcon. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable RSE d’Eiffage Construction, président de Réavie, le 24 mai 2019

« A travers la maison du projet, ils [les gens] sont invités après la visite de la maison du projet à rentrer dans le chantier. Il y a un chemin qui est dédié à ça et donc ils passent et voient l’ensemble du chantier en évolution durant son histoire, pendant les années où il va se passer. Puis après il arrivent dans la plateforme solidaire de RéaVie et là ils découvrent la dépose méthodique, la collecte. Et puis, ils découvrent les matériaux qui ont été sauvés de la benne et qui peuvent aujourd’hui avoir une deuxième vie et qu’eux-mêmes peuvent acquérir, ils peuvent acheter ces matériaux-là qui étaient à l’Ecole Centrale ».

 

Extrait de l’entretien réalisé avec les architectes urbanistes de l’agence Leclercq Associés, le 24 février 2021

« [Est-ce que vous trouvez que la maison du projet c’est un outil pertinent ? Ou au contraire, est-ce que c’est plus un inconvénient dans cette mission ?]

Non, la maison du projet c’est un élément qui devrait être essentiel à chaque projet. C’est vraiment, c’est ce que je disais tout à l’heure, c’est l’interface entre le public et entre le projet. Et c’est ce qui permet d’être démonstrateur du futur. C’est comme devant la maison du projet, il y a l’espace public qui va être créé dans la ZAC. C’est essentiel dans le dialogue. Premier outil de dialogue. »

 

 

[ Voir Fig. 2 ] , [ Voir Fig. 3 ]

 

c-     Economie circulaire (bétons recyclés, réemploi)

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« Le fait de déconstruire les bâtiments ça créé beaucoup de déchets, beaucoup de gravats. Est-ce que finalement ces déchets, ces gravats je suis obligé de les enlever ? Parce que si je les emmène ailleurs, déjà où est-ce que je les mets, faut que je décharge et surtout faut que j’utilise beaucoup de camions. Donc ça va être, on avait calculé, ça nous faisait 1 200 camions. 1 200 camions qui allaient créer du trafic, créer du bruit, de la poussière et puis beaucoup d’essence et donc derrière de dégagement carbone. Donc l’idée c’est, on s’est plutôt dit, on va déconstruire les bâtiments mais tout garder sur place. Qu’est-ce qu’on fait d’un béton ? Le béton, on a fait des analyses de béton et il se trouve que c’est un béton de très bonne qualité. Donc on l’a concassé, on a fait des petits cailloux, les petits cailloux on les met en sous couche de voirie. Donc quand on fait une route avant de mettre le bitume dessous il faut mettre plusieurs couches et souvent on met une couche de graviers, mais plutôt que d’acheter du gravier neuf, on a mis notre gravier recyclé du béton. Et on s’est même dit on peut aller plus loin, on peut en faire des encore plus petits cailloux qu’on va mettre dans le nouveau béton. Le béton c’est du gravier, du ciment et de l’eau. En fait il y a au moins 30 % de notre nouveau béton, enfin de nos graviers qui viendront localement. Ce qui fait que 100 % des granulats, enfin de l’ancien béton, reste sur place et est réutilisé sur place. Donc ça c’est un moyen, donc il y a un coût global parce qu’aujourd’hui, faut quand même déconstruire, ça prend un peu plus de temps pour les déconstructeurs, il fallait concasser et ça ça coûte un peu d’argent. Mais finalement, si on met ça au regard des camions qui passaient et tout, finalement on a une petite économie quand même. Ce n’est pas une énorme économie mais on a une petite économie. Puis surtout, on a gagné en termes de cadre de vie pour les voisins, une vraie qualité parce que c’était 1 200 camions, un camion toutes les quatre minutes pendant trois mois, donc c’était un truc intéressant. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« [Pour une première fois en France vous êtes en collaboration avec l’IFSTTAR et la direction du développement durable pour expérimenter à grande échelle une technique de recyclage de béton, […], qui a la capacité de piéger du carbone.]

Oui.

[Pouvez-vous nous parler un peu de cette technique ?]

Oui. Alors ça pour le coup c’est, je ne sais pas si on va y arriver mais c’est une grosse fierté. En effet, l’IFSTTAR est dans un programme qui s’appelle FastCarb qui a pour but de développer ce piège du carbone, du CO2, au sein de granulats donc des petits cailloux. Nous, il s’avère qu’on avait l’ambition dès le départ, comme on détruit 85 000 m² de l’Ecole Centrale, on avait 90 000 m3 donc à peu près 100 000 tonnes de béton qu’on voulait garder et qu’on voulait réintroduire dans nos constructions. Dans nos voiries, ça, ça se fait très simplement mais nous l’ambition c’est de mettre aussi dans nos bâtiments. Donc déjà ils nous aidaient à développer des formulations de béton qui permettent d’aller au-delà de la norme, donc ça c’est déjà un premier échange avec l’IFSTTAR, mais la technique de recarbonatation des bétons ça c’est un peu la cerise sur le gâteau, la truffe dans la burrata. Eux, ils sont encore en phase laboratoire, ils avaient besoin d’un champ un peu plus grand d’expérimentations, donc là on va leur offrir. Alors je sais plus en termes de quantité mais ça doit être à peu près 3-4 tonnes de granulats sur lesquelles ils vont pouvoir travailler. L’objectif c’est donc nos cailloux qu’on a vraiment concassés, mis en tas, on va leur donner, ils vont les mettre dans un container fermé, vide, dans lesquels ils vont injecter du CO2 à haute pression et qui va se fixer sur les petits cailloux, les petits grains de sable. C’est presque du sable pour eux. Et donc ces cailloux-là après ils vont récupérer ce CO2 et ça va même les endurcir et leur permettre après d’être des cailloux, on ne s’en rend même pas compte, on va les réintroduire dans notre formulation de béton. Puisque le béton c’est des cailloux, du ciment, un peu d’adjuvent, de l’eau. Donc là on réintroduit ces cailloux-là, pour l’instant l’idée c’est d’en faire du mobilier urbain ou un totem, pas des choses structurantes parce qu’en termes d’assurance pour l’instant on n’est pas encore sûr du fonctionnement. Mais si on voit que ça marche et que ça marche rapidement, on le fera à plus grande échelle. Enfin l’objectif c’est qu’on puisse développer cette technique et après pouvoir l’introduire dans nos constructions. C’est un gros enjeu puisqu’on économise des ressources en utilisant du granulat qui est déjà détruit, qui était déjà existant, pas besoin d’aller dans les carrières pour aller prendre des cailloux, il est là. En plus on piège du CO2. L’idée in fine de la recarbonatation c’est de prendre le CO2 qui sort des cimenteries, puisqu’en fait dans les cimenteries ce qui pèse le plus en terme d’émissions de CO2 c’est la formulation chimique qui fait créer le clinker, en fait il y a beaucoup de CO2 qui sort par rapport à la formulation chimique et donc eux leur objectif ce serait de pouvoir récupérer le CO2 en direct pour le réintroduire après dans les granulats. D’avoir des espèces d’énormes installations industrielles qui permettent de piéger le CO2 directement dans les cailloux. Donc ça c’est les cimentiers qui travaillent là-dessus et nous on travaille sur la partie comment réintroduire le CO2 dans les cailloux, avec l’IFSTTAR. »

[En parlant de ces agrégats est-ce qu’ils ont la même résistance que les autres, les naturels ?]

Ça fait partie des enjeux dès le départ. Déjà il faut faire des carottages dans les bâtiments pour voir si les propriétés physiques du béton qui est en place va accepter qu’on puisse les réintroduire dans nos bétons. Donc nous oui, apparemment. On a fait des carottages et chimiquement parlant c’est plutôt acceptable. Bon, on va voir à la formulation de béton comment ça va réagir, les premiers tests, si nos ambitions pourront être assouvies on va dire. Il y a une partie technique qui est un peu compliquée à mettre en œuvre mais là pour le coup on est vraiment accompagnés d’experts. Et après il y aura une partie normative et de règles, d’assurances, etcetera qu’il faudra aussi lever. Et là c’est une autre paire de manches. Et, on ne parle pas avec les mêmes personnes.

[Vous nous aviez parlé aussi des adjuvants.]

Ouais.

[On voudrait savoir quels sont les adjuvants que vous rajoutez dans le béton ?],

Là ça sera les choses classiques d’adjuvant. Après l’enjeu c’est le ciment, on va quand même rajouter du ciment. Donc nous notre ambition pour la suite du quartier c’est d’utiliser une nouvelle technique de ciment, qui est le ciment bas carbone. On est en test sur un autre chantier à la Gaité Montparnasse qui a mis en place ce ciment-là qui permet de réduire de quatre les émissions de carbone du ciment. Parce que finalement dans le béton ce qui pèse le plus c’est le ciment malgré tout. Donc nous on économise sur le transport parce qu’on n’a pas de transport de matériaux, on va piéger un peu de CO2, mais ça ça va être vraiment à la marge, mais on va économiser beaucoup de transport. Mais après le ciment en revanche c’est le ciment classique donc ça va quand même peser très très lourd dans nos constructions et on va essayer de développer notre partenariat avec ce nouveau ciment pour pouvoir créer des bâtiments vraiment bas carbone. Le plus bas carbone reste pour l’instant le bois, mais enfin je dis ça tout dépend d’où il vient, tout dépend comment il est transformé. Parfois il y a des poncifs un peu qui sont dit sur les choses et justement là ça nous permet d’expérimenter, de savoir, d’objectiver un peu tout ce qu’on imagine. Est-ce que c’est vrai ? Est-ce que c’est vrai que le bois c’est vraiment moins carboné que du béton qui est fabriqué sur place ? Si ton bois il vient d’une forêt au bout de l’Europe, tu vois c’est à mesurer. »

[Et sinon l’utilisation de ce béton elle est sur tous les immeubles ?]

Non, ça va être vraiment ciblé. La partie recarbonaté ça ne sera pas les immeubles, ça sera que du mobilier urbain. Et la partie béton avec granulats recyclés, alors pour respecter la norme on va mettre 30 % de granulats recyclés, ça sera sur tous les bâtiments ça c’est sûr. Et dès qu’on va dépasser la norme, comme c’est expérimental, on va le faire sur un bâtiment. »

[D’accord, ça ne sera pas sur les sociaux par hasard ?]

Au départ c’était ça, mais finalement non. Et maintenant, il y en a un qu’on va expérimenter en phase une, la première phase de construction, et après il y aura tout un îlot donc trois quatre bâtiments si ça fonctionne on le mettra mais ça ne sera pas les sociaux. Après ça ne se valorise pas, commercialement parlant les gens ils s’en foutent que ce soit du béton 100% recyclé, c’est vrai. Je veux dire, eux ce qui compte c’est leur balcon, la taille des pièces.  Donc ça c’est un truc que tout le monde à conscience qu’on ne va pas le valoriser commercialement, donc les promoteurs ils s’en foutent un peu. Ils disent en gros « Si ça ne me coûte pas plus cher, tu fais ce que tu veux. ». Sauf que nous, pour le groupe Eiffage pour autant c’est très important de réussir cette expérimentation. D’ailleurs, c’est ce dont on parle le plus en ce moment dans le quartier, parce que c’est un savoir-faire très fort, qu’on s’engage dans une chose vraiment innovante et c’est toujours bien d’être pionnier et d’essayer de casser un peu les barrières. Donc ça ne se vend pas auprès du grand public mais en revanche dans la profession c’est très important. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable RSE d’Eiffage Construction, président de Réavie, le 24 mai 2019

« La dépose méthodique a été organisée à la fois par des membres de l’association, des bénévoles qui viennent d’un peu partout, avec une partie d’Eiffage, des collaborateurs Eiffage, qui ont participé, et les personnels en insertion qu’on forme à la technique de dépose. Donc il a été question d’analyser comment les mobiliers étaient fixés pour garantir une dépose qui va respecter le matériau et éviter de l’abimer.

[De le détériorer.]

Exactement. Et donc d’optimiser le futur réemploi. Donc ça a pris quelques semaines parce que c’était beaucoup de mobilier. On est sur 1 200 sièges d’amphithéâtre.

[Ah, quand même.]

Sept amphithéâtres qui sont complétement démantelés parce qu’ils avaient une partie métallique, une partie bois, une partie cuir pour le coussin, pour ensuite après organiser le conditionnement sur palettes et faciliter après leur transport. »

 

« Après, c’est une expérience qu’on va garder en mémoire parce que ça permet de mettre en application des concepts, notamment pour moi, sur l’économie circulaire. Le fait qu’il y ait 60 tonnes de matériel qui n’ont pas été mis à la benne et pour lesquelles du réemploi va être fait, et que des amphithéâtres maintenant qui devaient aller à la benne sont au service d’étudiants sénégalais dans une faculté au Sine Saloum. Donc c’est intéressant et il faudrait que cette réflexion-là soit menée à chaque fois qu’on a besoin de rénover, de démolir ou d’aménager un nouveau quartier. Ça doit faire partie des réflexions : comment penser les nouveaux projets en faisant en sorte qu’on limite les déchets. »

[Oui ça peut être un repère de réflexions après ?]

Oui voilà, faut que ça soit au début d’une démarche systématique quand on fait de l’aménagement urbain »

 

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« [Comment le projet de LaVallée et les innovations qui vont avec ont déjà permis de faire évoluer les manières de faire au sein d’Eiffage en général ?]

Oui. Alors l’exemple qui me vient en tête aujourd’hui c’est RéaVie, c’est le réemploi dans les chantiers de déconstruction. Aujourd’hui, la direction générale a compris le message qu’on a porté sur LaVallée. Donc j’avais rencontré [Mr X] en octobre 2017 et moins d’un an après on a réussi à inaugurer la plateforme solidaire, qui a ouvert ses portes au public et dans lequel il va y avoir des aménagements, de la vente de matériel reconditionné ou transformé. Aujourd’hui, la position de la direction générale c’est de dire que tous les chantiers de déconstruction, quelle que soit la maitrise d’ouvrage, Eiffage Aménagement, Immobilier, ou autre, Réavie doit être associée. Et ça montre aussi que LaVallée a déployé, dans le cadre de la passation de nos marchés, des closes qu’on avait inscrites. Ça a permis aussi aux démolisseurs, enfin aux entreprises de déconstruction de se poser la question et de se dire : « Comment est-ce que je suis capable en tant qu’entreprise qui a, entre guillemet mauvaise presse, un démolisseur, comment est-ce que finalement je peux être vertueux, comment est-ce que je peux être finalement à l’initiative de la création de valeur de ressources ? ». Et finalement quand on parle, des éléments de second œuvre, quand on parle de déployer des filières de recyclages innovantes sur la ferraille, du béton léger, ou du plâtre, enfin voilà tous les matériaux constructifs de second œuvre, c’est toujours intéressant de travailler ça. Et nous dans le cadre de nos marchés on a intéressé financièrement les entreprises. On ne va pas se mentir, les entreprises dès qu’il s’agit de toucher au portefeuille elles s’intéressent, elles se posent la question. Et finalement Châtenay, enfin LaVallée, ça a été un déclic pour beaucoup d’entreprises. En tous cas les trois qui ont répondu : Eiffage Démolition, Chastanier et Ocamat & Toyère, qui aujourd’hui systématiquement dans les réponses aux consultations qu’ils mènent avec d’autres maîtres d’ouvrages intègrent la notion du réemploi. Et finalement ça devient un vrai savoir-faire, c’est la création d’un nouveau métier dans le cadre des opérations de curage et de dépose méthodique de se dire : « Ces luminaires je les dépose de telle manière, les garde-corps je peux les récupérer pour en faire du mobilier, … ». On a vraiment d’anticiper la modification et de travailler un peu sur la conduite du changement pour que finalement ces entreprises-là, qui n’étaient pas forcément très vertueuses en termes de valorisation de déchets etc., soient finalement peut-être les premiers producteurs de ressources dans le cadre des chantiers futurs. Il y a une réglementation qui doit sortir à l’horizon …je ne sais pas si c’est 2020 ou 2023, je ne sais plus, qui imposera la valorisation de 70% des déchets des chantiers. Sauf que l’avantage c’est que la notion de déchets dans le B.T.P. c’est à partir du moment où ça sort du site. Donc si on arrive à retraiter in situ, à travers des opérations de déconstruction des matériaux de déconstruction ou de second œuvre, finalement on ne crée pas un déchet mais on crée une ressource et dès lors que l’on arrive à faire ça on a une autre approche carbone du chantier et derrière on a une vraie logique d’analyse du cycle de vie des bâtiments. Parce que finalement le process qu’on va mettre en place sur immeuble aujourd’hui, si dans 20 ans, dans 20 ans ou 30 ans, quand on va le déconstruire on va se dire : « Ah bah tiens la prise électrique, le luminaire, on le réemploi. », finalement l’analyse du cycle de vie du bâtiment elle sera beaucoup plus longue et elle sera beaucoup plus vertueuse du point de vue de l’environnement que si tout était parti à la benne. Donc on est vraiment dans un schéma cyclique où finalement on est plus sur quelque chose : « J’ai besoin d’une ressource, je réalise, je construis, je démolis, j’évacue. ». On est plus sur quelque chose de linéaire mais on revient vraiment sur quelque chose de cyclique, où finalement le déchet de construction redevient la ressource. Et ça si on arrive, notamment sur tous les chantiers du Grand Paris, avec notamment toute la gestion des déblais de terre qu’il va y avoir dans le cadre de la création du super métro, si on arrive à revaloriser notamment à travers des systèmes constructifs, typiquement les bétons de terre, on aura tout compris. On aura tout gagné et on sera vraiment sur une approche carbone hyper intéressante. L’impact environnemental des projets sera beaucoup moins important, et on aura beaucoup plus d’ambitions pour aller plus loin d’une manière générale sur les projets. Et l’approche projet sera complétement différente de ce qu’on pouvait faire il y a encore 10 ou 15 ans, où on avait un bâtiment de logements où on ne se posait pas la question du mode constructif. On était en béton avec des renforts en béton, etc. Et du coup c’est cette appropriation de comment est-ce que la ressource on la gère, qui permet d’avoir in fine une vraie logique, une vraie stratégie d’industrialisation, de process constructif avec des matériaux innovants. »

[ Voir Fig. 4 ]

 

d-     Maquette numérique

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« [Vous nous avez parlé à plusieurs reprises de la maquette numérique.]

Oui, tout à fait.

[Donc c’est quoi exactement ? C’est par rapport aux nouveaux usages, c’est ça ? »]

Ouais tout à fait. En fait la maquette numérique, on a l’ambition …, je pense que c’est un peu le mot qui ressort de cet entretien. On souhaite mettre en place une maquette numérique à l’échelle du quartier. On parle beaucoup de BIM depuis plusieurs années. Le Building Information Model ou Management selon le cas dans lequel on se trouve. L’idée c’est de travailler sur la conception 3D des bâtiments et des espaces publics. Donc une conception à l’avancement, avec les mêmes phases : un niveau APS, un niveau permis, un niveau pro, un niveau DCE, une partie exe et derrière un DOE – un dossier des ouvrages exécutés-, donc ce qui a été réalisé, qui permette finalement de délivrer une maquette globale qui permette notamment à la ville de gérer les futurs espaces publics depuis un ordinateur central tout simplement. C’est-à-dire que finalement on aura plus besoin, entre guillemets, que l’opérateur du service municipal de la ville de Châtenay fasse en hiver son tour de ronde pour voir quels sont les lampadaires où l’ampoule ou la LED est grillée. Mais directement avec des systèmes de capteur et d’information, à travers une interface qu’on est en train de développer avec l’IFSTTAR, on va pouvoir avoir un agent qui sera capable d’intervenir ponctuellement tout de suite soit en prévention, soit en remplacement typiquement d’une ampoule grillée d’un candélabre. Si on a un désordre de voirie, par exemple, avec de l’orniérage ou un nid de poule qui se créerait ou, je ne sais pas, une plaque de verglas qui se créerait à un endroit pour lequel il pourrait y avoir des risques de chute, on peut avoir des éléments communicants. C’est vraiment ces aspects-là qu’on essaie de déployer au maximum. Donc ça c’est sur la partie espace public. Beaucoup de captation de données et de la gestion de la donnée pour intervention. Et après sur les lots privés, c’est de se dire que typiquement quand LIDL construit son siège social, demain, quand il va faire sa gestion pour l’exploitation et la maintenance de son bâtiment, il saura avec sa tablette dire « j’ai mon réseau de chauffage qui passe là, je sais que la fuite elle est là, je sais comment réparer, et je sais exactement quelle pièce, quelle nomenclature. ». Voilà, c’est vraiment intégrer de la donnée pour se dire le jour où je dois remplacer sur l’espace public, je ne sais pas, un bout de béton désactivé sur un trottoir, je sais dans la maquette numérique que la formulation c’est ça. Et du coup je sais que mon revêtement, je ne vais pas avoir un revêtement bleu ou rouge. Je vais avoir un revêtement en béton désactivé avec la bonne formulation. C’est un peu ça qu’on essaie de mettre en place. Après peut-être que demain les syndics de copropriété, leur métier va évoluer forcément. Nous en aménagement ça évolue, en promotion ça commence à évoluer, en construction aussi. Et eux ils sont en bout de la chaine sur toute la partie gestion, exploitation, maintenance. Eux demain peut-être que ça sera à travers des compteurs communicants, à travers la maquette numérique qu’ils seront capables, entre guillemets, de faire des appels de fonds au niveau des copropriétaires pour les charges, etc., pour l’entretien de la copro, quelle zone a été entretenue par la société d’espaces verts, quelle zone ne l’a pas été. C’est aussi avoir une gestion numérique, finalement, de ce qu’il se fait actuellement mais à travers un objet globalisé. Donc c’est l’ambition qu’on a. Cette partie-là pour la partie technique, opérationnelle et après on a une autre partie qui est pour le volet communication, immersion, où l’idée c’est à travers cette maquette numérique permettre avec de la réalité virtuelle augmentée de pouvoir permettre aux gens, quand ils vont aller à la maison du projet, de mettre les lunettes VR sur le nez et de se balader dans le quartier comme s’ils y étaient. Donc c’est ramener finalement le volet préfiguration, appropriation, immersion au cœur du sujet. Et finalement c’est vraiment ce qu’on souhaite développer. Et ça participe aussi au travail sur la transition numérique qui est … Je ne vais pas dire, qui est à la mode, mais qui est vraiment dans l’air du temps. »

 

C-    Nouveaux espaces et équipements

a-     Ferme urbaine et biodéchets

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« [Parlons de la ferme. Comment l’idée de la ferme est-elle venue ? C’était dans quel objectif ? Avec mes collègues, mes camarades de fac, on s’est tous posé la question : quartier de LaVallée, écoquartier, une ferme ?]

Parce qu’en fait c’est la volonté de développer des circuits courts et, le fait qu’il faut reprendre, justement toujours le développement durable, la nature. On est à Châtenay, Châtenay il y a 50%, sur la surface de la commune, sur la superficie de la commune il y a 50% d’espaces verts. Donc la nature, la verdure et le contact de la terre est quand même un élément très important pour la ville et pour les gens qui y habitent, on le sent bien. On voit bien qu’à Paris, on développe, partout où il y a un espace on met du vert. A Paris, c’est sur les toits. Là, on a un terrain de jeu, on s’est dit : pourquoi ne pas essayer de faire quelque chose avec un peu plus d’ampleur ? Et ça se prêtait bien parce que on a un terrain en talus qui est le long d’une voie ferrée. On s’est dit : là peut-être qu’il faut quand même apporter un service. Enfin c’est à la fois un service, montrer la nature aux gens qui vont habiter, et puis profiter de cet espace pour cultiver vraiment des produits qui peuvent être utilisés et participer au circuit court. Mais on cherche un vrai fermier, on cherche un agriculteur. »

[D’accord, carrément.]

Ce sera une ferme qui sera gérée par un agriculteur.

[Oui, mais après il faut dire qu’il y aurait des problèmes qui peuvent surgir à à cette ferme. Des déchets ?]

Oui, oui. Déjà la gestion des déchets, on cherche à gérer les déchets aussi on cherche à développer les biodéchets, à bien trier évidement, anticiper la réglementation sur les biodéchets. On va aussi essayer de récupérer les composts des gens, là, de les faire trier les gens qui vont habiter là. Et le compost il va être donné à la ferme et il sera réutilisé. Donc vraiment on a un raisonnement d’économie circulaire permanent, que ce soit dans la déconstruction des bâtiments ou dans l’usage futur des déchets et de l’organisation. Non, non les déchets agricoles ce n’est pas ça qui va nous poser problème, c’est plus le déchet des commerces, plus les cartons des commerces que les déchets agricoles d’un hectare. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ancienne directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, le 2 mai 2019

« Si vous voulez, en matière de services il y a aussi quelque chose de très intéressant : c’est la ferme urbaine. La ferme urbaine, on a dégagé un hectare sur un des côtés de la ZAC, du quartier, où effectivement une société va venir développer des activités permettant d’apporter une partie des denrées pour la cantine scolaire. Permettre aux habitants du quartier de venir cueillir. Donc ça sera un lieu d’animation pour les habitants. De produire des biens qui pourront être vendus dans le futur tiers lieu. Il y aura tout un développement d’activités pertinentes. Et à l’occasion de la visite de la maison du projet, on a senti qu’il y avait une forte appétence de la part de la population pour ce type de lieux. On nous en a beaucoup parlé.

[D’accord. C’est la première expérience pour Eiffage, l’intégration d’une ferme urbaine au sein d’un écoquartier ?]

Pas à ma connaissance, mais à cette échelle-là, en tout cas oui.

[D’accord.]

Il y a d’autres projets, mais à cette échelle-là, oui. Il y a quelque chose dont il faut que je vous parle, c’est la maison du projet. »

[Ouais, juste par rapport à la ferme urbaine …]

Oui ?

[Qu’est-ce qui vous a motivé pour l’intégrer ?]

On est dans un espace de nature quand même ici. On est dans une ville parc. Il y avait une bande de terrain effectivement qui semblait privilégiée. C’est des services, disons, qui sont aujourd’hui dans l’air du temps. On en entend beaucoup parler donc ça nous semble, dans une ville comme celle-là, à cet endroit-là ça nous semblait vraiment pertinent. L’idée c’est aussi de mettre des ruches, des poules. Dans le cadre d’une envie de se rapprocher de la nature, de la population et de travailler la terre. »

 

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« [Lors de la première présentation qu’on nous avait fait du projet et des innovations, il avait été question à un moment aussi de voir pour la récupération de tout ce qui était compost. C’est toujours quelque chose qui est …]

D’actualité ? Oui, alors ça va plus loin que le compost, on parle des biodéchets. En fait le compost c’est uniquement les déchets comment dire, c’est uniquement le végétal. Le biodéchet c’est tout ce qui est alimentaire et végétal, c’est-à-dire que le compost est une partie du biodéchet. On essaie de travailler avec l’Etablissement Public Territorial Vallée Sud Grand Paris, qui a la compétence déchets sur le territoire de Châtenay, pour mettre en place la gestion de biodéchets. Mais ça implique aussi une réflexion déjà à partir du logement. C’est-à-dire que finalement on crée un nouveau flux. Parce que le biodéchet finalement, si on classe en familles on a les ordures ménagères classiques, on a les emballages, le carton, le plastique et on a le verre, d’accord ? Dans les ordures ménagères finalement il va y avoir les biodéchets, qui intègrent la partie compost, et vous allez avoir tout ce qui va être coton, serviettes ou tous les déchets ménagers classiques autres qu’alimentaires et végétal. Et donc du coup on vient créer un quatrième flux qui pourrait notamment alimenter, à travers des opérations de méthanisation, alimenter en bio gaz ou en électricité. Réinjecter de l’ENR finalement. Donc on vient dans des méthaniseurs, par exemple, créer une opération de digestion du déchet, qui va créer du gaz, qui va entrainer une turbine et qui va créer de l’électricité. Globalement c’est un peu ça le process, et c’est de l’électricité qui est réinjectée au réseau, et qui après peut être consommée soit sur place soit plus loin en fonction des besoins. Alors là on est en pleine réflexion encore à ce jour parce que ce n’est pas quelque chose de tout neuf qui sera obligatoire en 2023. Vu que le quartier sera achevé en 2024-2026, on ne veut pas que deux ans après l’achèvement du quartier le quartier soit old school.  Donc il y a une vraie réflexion, de toute manière si on est en biodéchets, la gestion des déchets à l’échelle du quartier on a prévu des bornes d’apport volontaire qui sont situées à moins de 50 m des halls d’immeubles. En quantité de déchets, on ne va pas venir augmenter la capacité, donc finalement sur des questions de collecte on sera en mesure de remplacer des bornes d’apport volontaire d’ordures ménagères classiques par des bornes d’apport volontaires spécifiquement pour les biodéchets. Donc en volume de déchets on n’aura pas moins, mais en traitement et en filière il y aura une distinction qui permettra une meilleure valorisation, sachant que le traitement des biodéchets aujourd’hui est déjà obligatoire notamment pour tout ce qui est cuisines centrales par exemple, ça ce sont déjà des choses qui existent. Après la question du biodéchet c’est comment est-ce qu’on le valorise, comment est-ce qu’on arrive à lisser sur l’année sa gestion. Parce qu’un méthaniseur typiquement c’est quelque chose qui doit fonctionner h24 7j/7 365j/an. Donc comment on fait pendant les vacances d’été où tous les franciliens sont dans le sud de la France ? Donc c’est une vraie question de se dire comment est-ce que les 12 ou 13 millions d’habitants de l’Ile de France aliment les centres de biodéchets, si on fait que ça ? Il y a une réflexion qui est assez importante à mener et le travail, notamment en lien avec les filières agricoles qui sont assez friandes de ces biodéchets, est important mais nécessitera un contrôle qualité du biodéchet important. Il faut qu’on ait une certaine homogénéité du biodéchet pour que l’agriculteur puisse le réutiliser notamment dans ses champs.

[Je trouve cette thématique assez intéressante parce que la récupération de biodéchets était déjà quelque chose qui était faite au niveau de la piscine de la Butte Rouge, qui date des années 1920, où là c’était une récupération qui marchait par éviers vidoirs pour l’incinérateur de la piscine qui servait à chauffer la piscine.]

A chauffer la piscine exactement.

[Mais ça n’a pas marché justement parce que ça devait fonctionner de manière régulière et il n’y avait pas assez de biodéchets, donc c’était les mêmes problématiques. C’est pour ça que je trouvais cet élément assez intéressant.]

On ne réinvente pas l’eau chaude mais c’est vrai qu’àprès ce sont des sujets qui évoluent en fonction des époques. Pendant un moment le tramway il ne fallait plus en avoir, maintenant on en a partout. Ce sont des choses qui évoluent. C’est aussi pour ça, on parlait tout à l’heure de la possibilité d’évolutivité dans le projet, la question des biodéchets en est un exemple par exemple. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec les architectes urbanistes de l’agence Leclercq Associés, le 24 février 2021

« [Est-ce que vous pensez que l’objectif de l’écoquartier et de la ferme urbaine c’est à la fois d’éduquer les habitants à l’écologie, au développement durable, mais aussi les personnes qui vont venir fréquenter les lieux ?]

Oui forcément. Dans tous les cas la ferme urbaine n’a pas une énorme volonté de production, elle est forcément là pour de la pédagogie. Et la pédagogie, c’est ce que je disais, passe aussi par les écoles et les collèges qui vont pouvoir travailler avec la ferme, qui sont juste à côté. Et c’est de pouvoir aussi promouvoir à travers le caractère de destination du quartier, de pousser les gens à venir dans le quartier, et de leur parler de ça aussi. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

« [Et au niveau de la démarche écologique et de la ferme urbaine, est-ce que l’objectif social serait d’éduquer les habitants, de les former à l’écologie, au développement durable ?]

Je pense que ce n’est pas l’objectif premier de ces espaces-là. Après, c’est un atout qui est valorisé, mais je pense que le premier objectif, que ce soit des espaces verts, ou de la ferme urbaine, c’est d’avoir un cadre de vie qui est agréable, avec des espaces, enfin du coup ça contribue à plein de choses. Mais c’est à la fois des lieux d’agrément, de loisirs, mais aussi des lieux de rafraîchissement, de calme, avec des fonctionnalités écologiques, des fonctionnalités de gestion des eaux pluviales qui sont hyper importantes dans les milieux urbains denses notamment. Et donc c’est essentiel de retrouver des espaces comme ça sur les projets et dans des dimensions qui sont généreuses et significatives. Après la ferme urbaine, elle a la spécificité en plus de travailler sur tout ce qui est production alimentaire, productivité des espaces verts. Mais bon ça reste une dimension qui n’est pas…, la ferme urbaine n’alimentera pas tout le quartier bien sûr. Mais, c’est quand même une démarche intéressante au moins pour approvisionner les cantines de l’école, etc., et d’être dans cette démarche de valoriser les productions locales et de circuit court, etc., qui ne répond pas aux besoins de tout le projet bien sûr, mais qui pose des bases intéressantes. »

 

b-     Eclairage nocturne

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« Tenez voyez je vous montre juste ça, ça c’est une innovation qu’on voudrait mettre sur Châtenay, pareil on n’avait pas prévu de le mettre. Et ça c’est un système complétement génial qui permet de faire baisser la facture d’éclairage public de plus de 50 %, c’est-à-dire qu’il y a un capteur sur chacun des réverbères, le capteur il détecte l’objet qui arrive et sa vitesse : voiture, vélo, moto, camion, personne à pied, personne en trottinette, il détecte. Et au fur et à mesure que vous arrivez vous avez un éclairage derrière, un éclairage devant et un éclairage dessus, donc vous êtes en permanence dans un train de lumière. En revanche deux éclairages derrière ça ne s’est pas éteint mais c’est plus qu’un balisage. Donc c’est un système d’éclairage au juste besoin. Ça évite d’éclairer les villes toute la nuit alors qu’il n’y a que trois personnes qui vont passer, mais quand les trois personnes vont passer elles auront un éclairage. Et puis ça permet de limiter la pollution lumineuse dont on pressent aussi qu’elle est mauvaise et pour la biodiversité, la faune, mais aussi pour nous. Donc ça c’est assez génial. »

 

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« Pour la route, on a prévu de travailler sur de la route qui va être constituée en granulats recyclés, notamment sur les bandes de roulement. Donc aujourd’hui dans l’aspect opérationnel du chantier on a conservé des voiries en enrobé, qu’on a diagnostiqué, dans lequel il n’y a pas d’amiante, etc. Et on va venir récupérer le fraisa d’enrobé, donc en fait on va enlever les 5 centimètres du, on appelle ça du noir, c’est le granulat enrobé, le mélange qui donne cette couleur-là au granulat. Donc on va récupérer, on va le fraiser. Et ce fraisa d’enrobé on va le recycler et le réinstaller sur les futurs enrobés du quartier typiquement. Après on va mettre en place une innovation par rapport aux aspects biodiversité, on a des chauves-souris à proximité du site, on sait que la lumière ce n’est pas forcément bon pour la biodiversité, donc plutôt que d’avoir déjà des candélabres qui marchent plein pot toute la nuit, on a des abaissements d’intensité lumineuse et on a par des systèmes de capteurs de détection de piétons, de voitures qui permettent de faire une montée en puissance progressive la nuit des candélabres pour abaisser de manière importante les consommations d’énergie, en plus du fait qu’on sera sur de l’éclairage LED. Et donc par rapport à ça, on a également toute la signalétique voirie sur les enrobés qui sera en peinture photoluminescente. On sera avec une startup qui s’appelle OliKrom. Et l’idée c’est effectivement de travailler sur une peinture spécifique qui réfléchit la lumière, enfin qui restitue la lumière la nuit et qui permet de donner une zone de sécurité et une meilleure visibilité des zones de passage entre les espaces piétons et les espaces circulés. »

 

c-     Nouveaux usages

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« [En parlant de la richesse de ce projet on aimerait savoir quels sont les principaux bâtiments les édifices qui font … »]

Qui vont structurer le quartier ?

[Voilà.]

C’est le, ce que vous m’avez demandé, le programme. Je pense que le tiers-lieu, ce gymnase est vraiment très joli. J’espère qu’il sera joli, enfin qu’il sera beau. Dans la ferme urbaine, on verra dans les archives si ça a été réalisé, mais on est en train de proposer une chaufferie qui sera sur le territoire de la ferme où il y aura les serres qui seront chauffées par la chaleur fatale de cette chaufferie et on mettra un petit centre de méthanisation de biodéchets. Donc les biodéchets du quartier vont être recyclés pour que ça fasse de l’énergie, ce qui permet à cette chaufferie d’utiliser moins de gaz que prévu. On est déjà à 70 % d’énergie renouvelable, donc peut-être qu’on sera plus. Et en plus, derrière ils vont créer du compost qu’on pourra réutiliser sur la ferme. Donc là, on aura un beau bâtiment totem de l’énergie renouvelable, de l’économie circulaire, ça j’espère que ça va être un peu emblématique. Si la mairie accepte le projet. Ce tiers-lieu. Et après on aura des totems dans quelques bâtiments. Donc on aura l’ambition d’avoir un bâtiment tout en bois et biosourcé qui sera face au Parc de Sceaux, on aura un bâtiment en béton recyclé à 100%, on aura un bâtiment peut-être en terre, l’école sera en terre crue. Donc on aura des parcours un peu comme ça du matériau, je pense qu’on pourra un peu dessiner dans la ville. J’espère que ce sera un peu valorisé.

[Donc il y a une variante de matériaux pour le projet.]

Ouais, après parfois un bâtiment en bois on ne s’en rend même pas compte que s’en est un, donc il faut vraiment en parler, le valoriser. Est-ce que au sein du tiers-lieu on aura une animation pour expliquer ce qu’est le projet, permettre aux gens de visiter le quartier, de comprendre que la promenade plantée c’est des espèces locales qui dépolluent les eaux, etcetera. Voilà, qu’il y a un peu d’animation de quartier. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« Et après dans la partie les nouveaux usages et bien on réfléchit à faire une chambre d’amis partagée, on réfléchit à partager sa place de stationnement. On réfléchit à des éléments comme ça. On peut partager des services entre voisins. Comment on travaille sur le lien social à partir de nos outils que sont nos smartphones pour ne pas les citer.

[Oui, ce serait une bonne idée mais ce serait un peu communiquer avec les nouveaux habitants.]

Exactement, alors après c’est une demande aujourd’hui. C’est vrai que de plus en plus, on commence à voir des gens qui … Dans l’offre immobilière parler de conciergerie de quartier ça devient quelque chose d’un peu intéressant pour se faire livrer plus près de chez soi. Alors c’est lié bien sûr au commerce un peu dématérialisé, mais voire même on peut imaginer un commerce qui, si on se fait livrer ensemble il n’y a qu’un seul camion qui vient. Donc on peut avoir des bénéfices un peu d’ensemble. Alors tout ça, alors la question : est-ce que c’est vraiment écologique ? C’est pour ça qu’il faut un peu se dire la demande, les nouveaux usages, est ce qu’ils apportent vraiment une vraie qualité de vie, une résilience ou est-ce que les gens ne sont pas juste feignants ? Donc parfois il faut aussi se poser des questions par rapport à la demande réelle. Est-ce que ce n’est pas un service hyper cher et finalement peu de personnes pourront l’utiliser ? Et est-ce qu’il y a un vrai gain de carbone ? Donc, en tous cas il faut regarder cette demande-là avec bienveillance, mais en essayant de dire moi en termes d’innovation si je gagne du carbone, si ça a un coût global et si derrière ça apporte un vrai plus de qualité de vie, là on peut se dire que je suis dans l’innovation. »

 

« [LaVallée a été créé comme un écoquartier connecté, qu’est-ce que vous entendez par connecté ?]

Alors, connecté, alors c’est à la fois justement ce qu’on vient de dire sur le quartier prêt aux services. Donc, c’est à un moment on peut aussi avoir des informations directes sur son quartier, sur à la fois ce que pourrait, enfin des propositions de voisins, ça peut être du temps de partage, ça peut être des ateliers, ça peut être des fêtes. Donc, ce qui fait que cette connexion soit au sens ville collaborative, au sens un peu citoyen. Alors ville connectée parce qu’on pense que c’est important aujourd’hui de connecter toutes les data qu’on créée. Les gens qui ont consommé de l’énergie, consommé de l’eau, consommé des services avec la conciergerie, se déplacer, enfin tout ça va permettre d’avoir des données urbaines et en fait en suivant ces données urbaines on pourrait optimiser le quartier. On se rend compte que le matin il y a beaucoup de gens qui prennent le bus, peut-être qu’il faut augmenter les bus, peut-être pas de…, les horaires de bus peut-être si on avait cinq minutes plus tôt ce serait vachement mieux. Donc en fait ça permettrait comme ça de travailler sur une optimisation un petit peu du quartier qui permettrait des pics énergétiques. Ça peut être des alertes, je ne sais pas, je dis n’importe quoi, alerte, une information sur un trafic, attention un accident, passer par ailleurs. Enfin, la connexion peut être beaucoup sur ce qu’on va appeler l’intensité urbaine. En fait que les gens puissent avoir des informations sur la vie de leur quartier, à la fois pour être alerté, voire pour y participer. Connecté, parce qu’on est connecté à la chambre d’amis partagés et demain pour un anniversaire j’ai des amis qui viennent, et bien je réserve deux chambres d’amis. Ce qui fait qu’à la fois ils seront tout près mais un peu indépendant et s’ils sont un peu fatigués ou ont un jeune bébé, ça permettrait aussi qu’ils puissent être un peu indépendants. Ou les personnes âgées qui peuvent dire : « Moi je veux bien venir, mais avec tous les enfants qui vont courir partout ça va me casser la tête donc je veux pouvoir à un moment aller me reposer. Donc cette connexion apporte un vrai service au quartier ou à la vie des gens. »

 

 

V-  Quelle trajectoire se dessine pour LaVallée ?

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« Il n’y a pas eu vraiment de passage de témoin avec l’Ecole Centrale qui n’a pas vraiment eu de volonté de faire une grosse fête au départ. Par contre l’urbaniste a eu une bonne idée, c’est qu’au milieu du quartier il y avait l’ancien gymnase. C’est un beau bâtiment des années 70. Alors il faut aimer le béton, il faut aimer les gros piliers en béton. C’est un bâtiment qui a une architecture très teintée années 70 et qu’on va réhabiliter en ce qu’on appelle tiers lieu. Donc il y aura un gestionnaire qui fera un restaurant, et puis aussi il y aura plein d’animations. Plein d’animations à l’intérieur, ce sera le lieu de vie du quartier. […] Par contre l’architecture reste là. Donc ça ce sera le lien historique, le lien physique avec avant […]. Alors par contre les urbanistes s’étaient posé la question « est ce qu’ils ne pouvaient pas garder plus de bâtiments ? ». Après on s’est rendu compte que le gros bâtiment avec beaucoup de salles de cours et d’amphithéâtres, c’était beaucoup trop grand pour nos besoins d’école et de collège. C’était un peu compliqué de le garder puis de le transformer en collège et école parce que les amphithéâtres pour les écoles primaires ce n’était pas terrible. Et puis les chambres d’étudiants étaient un peu petites, c’était les retransformer en appartements. Donc, il n’y avait pas vraiment d’intérêt à conserver les bâtiments. Mais la bonne idée ça a été de conserver le gymnase pour faire le lien. Et le lien est aussi fait par le nom, parce que Monsieur Lavallée était l’un des fondateurs de l’Ecole Centrale. Alors c’est un jeu de mots. Monsieur Lavallée je ne suis pas sûr que les gens disent « Ah mais oui bien sûr c’est un fondateur de l’Ecole Centrale ! » Mais plutôt la vallée, le côté vert donc c’est un jeu de mots entre le nom propre de monsieur Lavallée et la vallée qui donne une image verte de nature qui était demandée aussi par la ville pour faire le lien avec tous les beaux espaces verts de Châtenay Malabry. »

 

Extrait de l’entretien réalisé la directrice de l’aménagement d’Eiffage Aménagement, présidente du Directoire de la SEMOP Châtenay-Malabry Parc-Centrale, le 23 mai 2019

« [D’où vient cette idée de LaVallée, nom et concept. Est-elle matérialisée sur l’architecture du projet ?]

Eh ben, pas du tout. En fait c’est vraiment une comm’. Donc en général pour marquer les esprits, pour identifier les lieux on essaye de trouver un nom. Alors soit c’est le nom du quartier, la Caserne de Bonne dont je vous parlais, ça s’appelle de Bonne parce ce que c’est la caserne de Bonne. C’était une ancienne caserne militaire. Il y a plein d’autres quartiers qui ont des noms qui sont de fait les noms du quartier, enfin du lieu. Ici il n’y avait pas de nom, parce que c’était une école fermée. Donc personne n’y allait, il n’y avait pas de vie. Donc il fallait inventer. On s’est dit : il faut inventer une identité à ce quartier. En fait c’est plutôt une agence de comm’ que des architectes qui nous ont fait ce nom. On a fait travailler une agence de comm’ qui nous a fait des propositions sur trois, quatre trucs. On a demandé au maire son avis. Et finalement pourquoi LaVallée ? Parce qu’en fait dans le projet ici, dans le programme, on a 15 000 m² de commerces, on a des logements, on a des bureaux. Le maire veut que ce quartier-là, après avoir été complétement fermé et juste pour les étudiants, soit ouvert et animé. Et donc on est parti sur la thématique géographique et dans une vallée c’est là où il y a la vie et le dynamisme. […] il y a un petit clin d’œil parce que le créateur de l’Ecole Centrale s’appelle Alphonse Lavallée. Donc ça laisse un tout petit message historique. Pour ceux qui veulent chercher, il y a un petit clin d’œil sur le fait qu’avant c’était Lavallée. Donc ça n’a rien à voir avec l’architecture. »

 

Extrait de l’entretien réalisé le directeur de programmes d’Eiffage Aménagement, le 5 avril 2019

« [Y-a-t-il un thème pour le nom des rues ?]

Il n’y a pas de thème. On a des axes forts, on a des équipements très importants, on a des commerces, on a une ferme urbaine. La ville de Châtenay-Malabry : ville-parc, 50% d’espaces verts, d’espaces de nature sur son territoire. Donc on est plutôt sur le lien, on va dire, nature et territoire. Ça reste quand même assez vague. On peut aller de la rue de la ferme à l’avenue de la botanique. Ce genre de choses. Ou ça peut très bien être les jardins de La Vallée. C’est un peu la tendance mais ça peut être complètement autre chose dans les noms. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec les architectes urbanistes de l’agence Leclercq Associés, le 24 février 2021

« On retrouve oui des éléments du passé dans l’idée du palimpseste avec justement l’histoire des couches de bétons qui viennent fabriquer le socle du sol du projet. C’est une certaine image. Mais après oui, on va retrouver dans le patrimoine aussi une partie du mail des tilleuls et le tiers-lieu, avec le gymnase, on se bat pour le garder. Et oui, forcément, on essaie de garder un peu de traces, ce n’est pas forcément la partie la plus simple, mais oui on essaie de garder la trace du passé. Mais la trace, comme je disais tout à l’heure, vient aussi du verbal, de l’oral, et de l’explication de ces fameuses sous-couches en béton. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la chargée d’études principales d’Even Conseil, le 17 février 2021

« La ville-parc ça fait vraiment de l’identité de Châtenay, et c’est quelque chose que la ville porte beaucoup et dont à laquelle elle sensibilise beaucoup aussi les prestataires avec qui elle travaille. Donc l’importance qu’on soit dans une ville-parc, je pense que ça a influencé vraiment le plan guide urbain du projet dès les premières étapes. Je pense que c’est aussi pour ça que l’agence Leclercq a eu cette logique de travailler sur une promenade plantée, qui connecte la coulée verte au parc de Sceaux, qu’il y a eu cette logique aussi dans le travail des ambiances par l’agence Base qui a travaillé sur les ambiances paysagères, sur la promenade plantée qui sont cohérentes avec cet esprit-là, et puis il y a aussi une partie des identités du quartier. Il y a des identités paysagères et architecturales qui ont été définies un peu en fonction de la disposition des lots dans le quartier. Il y a une partie vraiment orientée parc de Sceaux, une partie ville-jardinée. Donc je pense que toutes ces ambiances-là, qui ont été déclinées dans nos cahiers de prescriptions, et le travail des architectes qui travaillent sur chaque lot, ça a vraiment trouvé sa source dans l’identité ville-parc de Châtenay. »

 

 

VI-  Futurs de l’écoquartier

Extrait de l’entretien réalisé avec l’ingénieur, architecte, directeur des Relations Institutionnelles, du développement commercial et de la stratégie Bas-Carbone – Eiffage Construction Grand Ouest – ancien directeur des innovations d’Eiffage Aménagement, le 26 mars 2019

« On sera en 2040, donc j’espère que quand il fera chaud il y fera frais. J’espère que la ferme urbaine se sera développée et que même on se sera mis à faire de l’agriculture dans tous les cœurs d’immeubles. Il y a 30% de pleine terre donc c’est possible demain de les remettre en agriculture. Aujourd’hui c’est l’agriculture, mais on pourrait imaginer que le quartier sera performant. On aura presque fini de payer le réseau de chaleur, […] donc on pourrait imaginer que les gens soient chauffés à 60% par géothermie et à 40% par du biogaz. […] Et puis, qu’il y ait des équipements de déplacement individuel qui ne seraient peut-être pas des voitures, peut-être que ce sera plus partagé mais qu’il y aura toujours cette possibilité d’avoir un véhicule individuel. Peut-être pas le sien, et peut-être qu’on peut imaginer qu’au moins les voiture ne se garent pas dans la rue et que la place de stationnement qu’on a prévu soit suffisante, voire soit vide, permettant aux gens allant au parc de Sceaux de se garer naturellement sous les immeubles de tout le monde en partageant ces espaces-là. […] Votre question est toujours un peu intéressante en disant comment vous imaginez le quartier dans 20 ans. En fait il faut toujours essayer d’imaginer, mais pas de dire il sera comme ça. Il faut donner un ensemble de socles et se dire que détruire un bâtiment dans 20 ans, ce sera compliqué donc autant bien le construire aujourd’hui. Donc aussi il y a les bâtiments, les équipements, les infrastructures, c’est un peu un socle important. Et après se dire, par contre il faut que demain je dise que le logement peut être un bureau, le bureau peut être un logement, le pied d’immeuble peut être ouvert, fermé, etc. Que là les cœurs d’ilots ça peut être planté, déplanté, ça peut être de l’agriculture. Donc il y a toute une notion en disant il faut se projeter, mais en disant : « demain, il faut laisser une grande liberté aux gens de faire ce qu’ils veulent. ». Si on fige, c’est là où demain ça va être compliqué. Un lotissement c’est super figé donc c’est compliqué de dire qu’on va faire autre chose. Une cité c’est super figé donc c’est pour ça que l’idée c’est de permettre une évolutivité. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable RSE d’Eiffage Construction, président de Réavie, le 24 mai 2019

« Dans 20 ans, ça devrait être un quartier qui est bien installé, qui donne l’impression qu’il a toujours existé, on aura oublié qu’il y avait l’Ecole Centrale, et qui devrait bien vivre parce que tout a été fait pour que les gens s’y sentent bien avec tout ce qu’on a vu, le logement, des écoles, des bureaux, des lieux de travail. Dans un cadre exceptionnel parce qu’on est à côté du Parc de Sceaux. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec le responsable de projet Innovations Durables, de la Direction Développement Durable et Innovation Transverse Eiffage, coordinateur du Programme E3S, le 8 avril 2019

« Moi j’imagine plein d’enfants partout. (Rires) Qui se promènent dans la promenade plantée avec des oiseaux, avec des hérons, des crapauds, avec un tiers lieu où il y aura des fêtes, des concerts. En vrai, je l’imagine comme ça, avec très peu de voitures, les gens se rendront à pied, ils pourront traverser le quartier de manière apaisée, la circulation douce. Le soir, il n’y aura plus de lumière, ce sera juste des éclairages de peinture qui seront tout doux, qui chemineront le long des noues paysagères. On entendra justement les crapauds au mois de mai sortir de leurs tanières. Je l’imagine un peu comme ça, avec beaucoup d’activités, c’est comme ça que je le vois, enfin c’est comme ça que je le souhaite. Après si je suis réaliste, souvent moi ce dont j’ai l’impression c’est que les nouveaux quartiers ça fait un peu Disneyland, parfois c’est un peu artificiel. Là, je me dis que l’espace paysager tel qu’il est pensé va offrir un peu plus de caractère au quartier que juste des logements un peu tous pareils avec justement des décochés de façades. Là, il y aura une allée de commerces où il y aura forcément du passage, j’espère que les commerces seront bien choisis, que ça ne sera pas que du Etam et des trucs pour vendre des chaussures, j’espère qu’il y aura des restaurants, des boulangeries, des boucheries, des commerces de bouche, les gens pourront vraiment aller faire leurs petites courses, avoir accès justement à la ferme. La ferme, à mon avis, c’est un enjeu qu’on a un peu sous-estimé sur lequel on n’a pas trop la main, mais j’espère qu’il y aura un bon choix de commerces. Après ça évolue les commerces, parfois il y en a qui restent, au bout de deux ans ça disparait, ça change. Ça ne se fera pas d’un coup de baguette magique. »

 

Extrait de l’entretien réalisé avec la directrice Développement Durable et Innovation Transverse d’Eiffage, le 3 avril 2019

« Si, on réussit notre pari, ce qui va frapper normalement quand on visitera LaVallée ça sera la parfaite insertion des bâtiments dans la nature et pas l’inverse. Ce n’est pas la nature qui sera insérée dans l’écoquartier, c’est les bâtiments qui seront insérés dans la nature. […] Et on aura un bien être. Nous on fait le pari que le retour des habitants, quels que soient leurs origines sociales, leur âge, dans la nature est un bienfait. D’ailleurs, il commence à y avoir des études sur le sujet, notamment une étude américaine qui montrent que des enfants qui ont été pendant 5 ans, 6 ans dans une école en plein milieu de la verdure ont des meilleurs résultats que des enfants qui sont au milieu du béton dans une cité. Et on ne sait pas vraiment pourquoi si ce n’est que, on ne sait peut-être pas tout de toute façon, mais il y a plus de respiration, il y a plus de mouvements, il y a plus d’exercice physique parce que les gens ont envie de profiter. Ils vont davantage aller se balader, ils vont davantage aller jouer au ballon, ils vont davantage profiter de cet environnement plutôt que de rester devant la télé. Donc on sait … Il y a certainement d’autres éléments qui sont plus d’autre, enfin c’est ce qu’on appelle le rythme circadien, vous connaissez cette expression ? » Là-dessus je dois dire beaucoup de, de médecins vous disent « Ah le rythme circadien est favorisé par le respect des rythmes biologiques de la nature et tout ça. » On n’en sait rien en fait, on n’a pas d’études scientifiques. C’est juste une supposition, mais moi ça me va bien. Je me dis que c’est une supposition qui vaut le coup d’être tentée, ça m‘arrange bien et le principe de précaution veut que si on a remarqué que les gens s’y sentent bien, et bien il faut y aller. Faut le faire. Et, qu’est-ce que je peux vous dire d’autre ? Il y a aussi, dans 25 ans on ne sait pas également si climat qu’on nous prédit d’ici 2050 sera avéré et donc j’espère qu’on y vivra bien même quand on sort dehors et que la reconquête par la nature n’aura pas été … comment dire, stoppée par les conséquences du dérèglement climatique. Puisque là on essaie déjà d’anticiper les problématiques d’inondation, les problématiques de pluies torrentielles, de canicules longues … » .

[ Voir Fig. 5 ] , [ Voir Fig. 6 ] , [ Voir Fig. 7 ] , [ Voir Fig. 8 ]

 

Figures et illustrations

Figure 1 :

L. Bouriez Fromentin, Chantier LaVallée en cours, juin 2021

Figure 2 :

L. Bouriez Fromentin, Préfiguration du mobilier urbain et légendes. Exemple des « bancs en pierre », juin 2021

Figure 3 :

L. Bouriez Fromentin, Préfiguration du mobilier urbain et légendes. Exemple des « bancs en pierre », juin 2021

Figure 4 :

L. Bouriez Fromentin, « Prototype en « terre coulée » pour la construction du groupe scolaire de LaVallée », installé devant la Maison du projet, juin 2021

Figure 5 :

L. Vadelorge, Evolutions du chantier LaVallée, avril 2023

Figure 6 :

L. Vadelorge, Evolutions du chantier LaVallée, avril 2023

Figure 7 :

L. Vadelorge, Evolutions du chantier LaVallée, avril 2023

Figure 8 :

L. Vadelorge, Evolutions du chantier LaVallée, avril 2023