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DOI

10.25580/IGP.2020.0036

DISCUSSION

 

Cédric Fériel :

A-t-on des hypothèses pour expliquer le silence de Vénissieux, Villeurbanne et Caluire ? Est-ce que leur absence dans les mobilisations à rapport au profil socio-économique de ces populations, ou est-ce au niveau des maires… ?

 

Louis Baldasseroni :

Cet aménagement est un projet essentiellement revendiqué par et pour la ville de Lyon (surtout dans les années 90), et finalement Vénissieux et Villeurbanne semblent relativement accessoires dans ce projet. Cela peut expliquer leur silence. Par ailleurs une seconde hypothèse est à envisager du côté du point de vue des riverains. Les comités de quartiers que j’ai évoqués sont assez anciens et structurés de longue date à Lyon (le comité des États -Unis est l’un des plus récents), mais il n’en est pas du tout de même dans les communes de banlieue où l’expression des riverains semble bien davantage relever de l’initiative individuelle, ou se fait à l’échelle d’une rue, et n’est pas structurée comme à Lyon. Les riverains de la banlieue ne sont donc peut-être pas assez organisés pour pouvoir peser dans les débats publics.

 

Cédric Fériel :

N’y a-t-il pas aussi une opposition moins à forte à Lyon qu’à Paris, entre la ville centre et sa banlieue, opposition historiquement très marquée à Paris ?

 

Louis Baldasseroni :

Oui, très probablement aussi. Et dans le cas de cette infrastructure, la commune de Vénissieux a beaucoup à gagner avec le prolongement du boulevard, d’un point de vue routier, et surtout le prolongement avec le tramway qui désenclave une grande partie de cette commune. C’est moins évident pour les communes situées dans le nord, Villeurbanne et Caluire, beaucoup moins touchées concrètement par les travaux de prolongement, ce qui explique probablement leur absence dans les débats.

 

Cédric Fériel :

Peut-on dire que c’est le passage à l’intercommunalité, plus difficile à appréhender, qui contribue dans les années 90 – début 2000 à la perte de confiance des riverains ?

 

Louis Baldasseroni :

Il n’y a pas forcément de lien automatique en termes d’échelle, mais peut-être plus en termes de personne et de manière de gouverner. Louis Pradel avait beaucoup de contacts directs avec les comités de quartier lyonnais. Il avait l’habitude de faire des visites de terrain, sur les chantiers, en conviant les représentants des comités d’intérêts locaux. C’est une habitude qu’il conserve jusque dans les années 70, et je pense que cela explique que les riverains osent écrire directement au maire pour demander des précisions sur les projets. Dans les années 90 les pouvoirs publics sont plus éloignés et cherchent à avoir l’avis des riverains sur ces projets urbains de manière beaucoup moins directe, en ayant recours par exemple à des enquêtes sociologiques ou en missionnant des bureaux d’études extérieurs pour aller interroger les gens sur le terrain, sans passer par les comités de quartier. Ce qui explique aussi peut-être la défiance du comité de quartier, qui n’est pas forcément une défiance des riverains en eux-même, vis-à-vis du Grand Lyon en tant qu’institution.