FR EN
© Inventer le Grand Paris
Download PDF version

Temps de discussion 2

Consultez l'article en ligne

https://www.inventerlegrandparis.fr/link/?id=952

DOI

10.25580/IGP.2019.0030

Florence Bourillon

Quelques remarques pour commencer : les trois exemples que vous nous avez présenté se situent sur le même plan. Si j’ai bien compris, le programme de Bucarest et donc de la grande Roumanie est en partie réalisé, en tout cas donne des principes qui sont ceux qui vont être suivis par la suite ; celui de Cologne est en prévision avec une réalisation en pointillé ; quant à celui de Jaussely il n’est pas réalisée du tout. Ce qui frappe c’est de voir que ces projets se ressemblent. Il y a des points tout à fait communs qui ne sont pas seulement issus de la nébuleuse réformatrice du début du XXe siècle. C’est aussi je crois une espèce de dynamique des années 1920 qu’il ne faut pas oublier. La guerre est un traumatisme gigantesque et à très court terme on reconstruit véritablement un monde; c’est en tout cas la certitude des gens qui en font partie. Il faut donc parfois sortir d’une perspective à très long terme. En fait, ces années 1920 sont très porteuses d’espérances en particulier dans le cas roumain puisqu’il s’agit véritablement de créer un nouvel état qui va servir de tampon face à l’Union Soviétique (née en 1922). Dans ses arguments sur le plan urbain on retrouve des éléments évoqués dans la précédente discussion : le poids des infrastructures, la question des transports et la question du foncier et donc de la capacité à la gérer.

Enfin, un autre élément aussi qui m’a frappée dans la dernière communication dans les dernières images que vous nous avez montré du plan de Bucarest c’est qu’il est très similaire à Paris c’est une espèce de développement concentrique qui vient en rupture avec ce qui est proposé ailleurs

 

Beatriz Fernández Agueda

La question des transports rejoint un peu l’idée que j’avais évoquée. L’hypothèse d’un passage de l’idée d’un centre qui s’étend vers la périphérie vers une vision plus régionale, au sens de la région urbaine, avec les transports qui permettent d’aller au-delà de la zone urbanisée vers des territoires dont le foncier sera beaucoup moins cher. Il y a également cette idée que ce n’est pas seulement des centres, mais que vont devoir s’établir des connexions et des interactions qui viennent du centre vers la périphérie et de ces nouvelles zones qui sont au-delà de la zone agglomérée vers l’intérieur. Je pense que finalement cette pensée des transports est aussi liée à la logique d’aller au-delà de la zone urbanisée.

 

Harmut Frank

Dans la présentation de ces nouvelles idées sur la planification urbaine, il nous manque ici le cas de Londres, dans la meseure où pendant toutes ces discussions du début du XXe siècle, on a toujours fait la comparaison entre Londres et Paris. À Paris, la ville a ses fortifications encore intactes mais, militairement, elles ne sont plus nécessaires. À Londres, le système des transports ne donne pas de limites pour l’extension de la ville. Le système de logement est aussi totalement différent des petites maisons à Londres et des maisons de six étages à Paris. À Berlin, on a vu avec le plan d’Hobrecht une ville qui suit le modèle de Paris sans nécessité parce qu’il n’y a pas les frontières de la fortification et on propose une ville des Mietskaserne (immeubles de rapport) sur tout le territoire. Ce concept disparait avec les propositions du concours du Grand Berlin auquel Jaussely a participé. La participation de Jaussely est un lien très important entre les deux projets. On voit très bien qu’il a étudié les plans de ses concurrents à Berlin et il y a beaucoup d’éléments qu’on retrouve dans les plans de Paris. Sur la situation des transports, il faut remarquer qu’il y a une compétition à Paris entre chemin de fer et métropolitain, qui a pendant très longtemps fait obstacle au développement de la ville vers la banlieue

 

Bogdan Suditu

Au sujet du zonage et des transports, dans le cas de la Roumanie, le transport a suivi une décision en matière de zonage. Parfois il est arrivé très vite comme à Bucarest mais dans d’autres villes il a été parfois retardé, les propositions de zonage n’ayant de ce fait pas été appliquée.

 

Viviane Claude

J’ai cité Cornudet tout à l’heure : « Pour lutter contre la spéculation je propose de multiplier les moyens de transport, chemin de fer, tramways, les bateaux qui permettent à la population d’aller se loger plus loin ».

 

Florence Bourillon

Oui mais on sait que la spéculation se déplace avec les gens donc ça ne marche pas forcement.

 

Olivier Ratouis

Avec Cornudet on a ces trois termes d’extension, d’aménagement et d’embellissement et, dans le cas roumain, vous nous parlez de « systématisation ». C’est un terme très intéressant est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus ?

 

Bogdan Suditu

C’est le terme qui a été proposé par Cincinat Sfințescu et qui a été utilisé par la période communiste. L’idée de systématisation c’est de faire ordre. Quelque chose qui est bien ordonné, c’est quelque chose qui est bien systématisé. Ce qui est intéressant c’est que même aujourd’hui dans les discussions techniques parfois il y a des collègues qui pensent que l’idée de systématisation est plus claire que celle de plan d’urbanisme.

 

Beatriz Fernández Agueda

En Espagne, on parle d’organisation urbaine. Moi aussi ça m’a frappé le mot systématisation.

 

Corinne Jaquand

Pour revenir au bilan et aux aspects positifs du Sweckverband du Grand Berlin, ça a été un début d’articulation entre politique de transport et politiques foncières. C’était le sens d’ailleurs de la thèse de Martin Wagner qui a proposé, avec une certaine vision, de prolonger certaines lignes de transport pour à la fois desservir les zones de loisirs et les villes nouvelles qui allaient être bâties.

J’ai été aussi très intéressée par le cas de Cologne parce que ce qui a été reproché au Verband de Berlin mais aussi à l’administration des années 1920, c’est de ne pas avoir abouti à un plan d’urbanisme. Il n’y a pas eu de master plan à Berlin sauf cette structuration par les espaces libres qui étaient finalement des espaces publics modernes. L’autre critique qui a été faite c’est qu’il n’y a pas eu, dans les années 1920 en tout cas, de planification de centres secondaires. Je pense qu’on voit bien, dans ces année 1920, qu’on est à cheval entre un urbanisme de plan masse et quelque chose qui est plutôt de l’ordre d’un schéma d’organisation sociale

 

Intervenant(e) non identifé(é)

Pour Paris il y a quand même un phénomène particulier c’est que Paris est la ville de la commune ce qui explique que jamais le pouvoir central n’a permis son développement. Il y a toujours eu une lutte entre le pouvoir central/régional, et le pouvoir parisien. Je pense que c’est important cette lutte historique et il faut attendre une date récente, après 1945, pour voir le développement exponentiel de la région parisienne.